Page:Fiel - Prudence Rocaleux, 1945.pdf/89

Cette page a été validée par deux contributeurs.
91
prudence rocaleux

— Je ne pensais pas que tant de gens s’occuperaient de Monsieur.

— Détrompez-vous donc ! Pour le moment, je suis l’homme en vue et chacun veut avoir le petit capital promis…

— Douze cents lettres ! murmurait Prudence.

— Eh ! oui, je suis même obligé d’avoir une secrétaire pour m’aider…

À cet instant précis, la porte s’ouvrit, et un frais minois apparut dans l’entrebâillement. Une voix délicieuse cria :

— Bonjour, Marcel !

Puis, l’apparition recula, confuse d’apercevoir une étrangère, et resta immobile avec un air sérieux.

Prudence se leva, prenant une attitude digne et pincée. Elle salua M. Rembrecomme en disant :

— Au plaisir de vous revoir, Monsieur…

— Au revoir, Madame… et prenez note de mes avis, n’est-ce pas ?

Prudence se contenta de regarder le maître de la maison, en essayant de mettre dans ce regard une flèche de pitié. Qu’avait-elle besoin d’une semblable recommandation ? Elle était vaincue, mais elle ne céderait pas.

Elle reprit le chemin de l’office. Elle n’y trouva personne, pas plus que dans la cuisine, et elle s’en félicita. N’ayant pas le cœur à bavarder, elle n’attendit pas et s’empressa de partir.

Durant le trajet, sa colère monta. Elle ne pouvait comprendre M. Rembrecomme. Son amour-propre était blessé par la façon dont il avait accueilli ses communications. Elle se persuadait que cet homme se moquait d’elle et l’évinçait pour ne pas lui donner la prime promise.