Page:Fiel - Prudence Rocaleux, 1945.pdf/79

Cette page a été validée par deux contributeurs.
81
prudence rocaleux

Quand cette dernière apporta le café, elle souffla près de l’oreille de sa maîtresse :

— Café à la cuillère !

Et elle ressortit avec majesté. Mme Dilaret retint son rire, afin de ne pas avoir à expliquer tout ce qu’elle voulait dissimuler.

Quand, de nouveau, elle fut rendue à sa solitude par le départ du père et du fils, elle eut presque tout de suite la visite de Prudence, qui lui dit sans préambule :

— Je l’ai vu.

— Qui avez-vous vu ?

— L’assassin.

Mme Dilaret eut un choc désagréable. Le mot lui déplaisait. Dans les maisons honnêtes, il a une vilaine résonance. Puis, Prudence insistait par trop. Elle ne sut que répondre, mais tout de suite elle entendit :

— Il a une vilaine tête, et c’est bien le valet de chambre de M. Rembrecomme.

— Où l’avez-vous rencontré ?

— Chez son patron.

— Comment, vous êtes retournée chez ce Monsieur ?

— Dame, qui veut la réussite en cherche le moyen. Où que Madame aurait voulu que je le voie ? Je ne pouvais guère lui donner rendez-vous, alors que je ne connaissais pas son nom. Quoi que j’aurais mis comme adresse : Môsieu l’assassin de M. Rembrecomme, peut-être ?

La moue dédaigneuse de la servante était un spectacle à enregistrer, mais Mme Dilaret n’en était pas égayée. Ses craintes commençaient à se justifier, et elle se hâta de dire :

— Prudence, je vous interdis formellement de vous mêler de ces choses. Je ne veux pas que vous vous attiriez des désagréments et, par conséquent, à nous par contre-coup.