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prudence rocaleux

je devrais dire « Monsieur », puisque je vas le servir… et puis, il y a un fils, que l’on m’avait dit… Il est petit ?

— Non, c’est un homme de 26 ans.

— Tant mieux ! je me disais aussi que, vu vot’ visage, vous n’ pouviez pas avoir un gamin. Je n’aime pas les enfants, rapport qu’ils font enrager ceux qui s’esquintent et, quand on se plaint, les mères vous donnent toujours tort.

— Je constate que vous avez des idées générales un peu sévères…

— Elles sont exactes… j’ connais la vie… enfin ! pourvu que vos hommes ne soient pas trop difficiles, on pourra s’arranger. En attendant, je demande le chemin de la cuisine à Madame et le menu… Que Madame me raconte aussi comment qu’on mange les plats ici… C’est-y des gratins, des sauces, des gros morceaux…

Mme Dilaret interrompit cette énumération.

— Nous aimons tout ce qui est bien préparé. La seule chose qui nous fasse horreur, c’est le lait brûlé.

— C’est y que vos casseroles seraient mauvaises ? Parce que vous savez, les fonds trop minces jouent de ces tours-là…

Madame fut prise de court.

— Je n’en sais rien, avoua-t-elle.

Ce fut d’un air extrêmement dédaigneux que Prudence repartit :

— Alors, Madame, il faut réfléchir. On dit qu’il n’y a pas de mauvais outils, mais je sais, moi, que dans de mauvaises castroles, on ne peut cuire de bonnes choses… Ainsi, un ragoût…

Agacée, Mme Dilaret coupa net l’explication :

— Je vais vous montrer la cuisine.