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prudence rocaleux

— Vous me ferez ces réflexions-là quand vous m’aurez appris ce qui a pu vous plonger dans cet état…

— Oh ! oh ! je vois que Madame a ses nerfs en surface ! Alors, quoi que je dirai, moi, qui ai été apostrophée comme une rien du tout ?

— Si vous ne vous hâtez pas, je m’en irai, Prudence, répliqua Mme Dilaret sévèrement.

— Ben ! m’y voici… Mais, Madame ne sera pas très contente de savoir. Jen ai peur.

La pauvre madame, cette fois, trembla un peu et se demanda ce que sa domestique avait bien pu commettre.

— Donc, pendant que je transpirais dans cette attente, survient une petite bonne femme sans chapeau. Tout le monde la regarde. C’était bien fardé. Moi, je pensais que si elle avait été bien nettoyée, elle aurait été fort gentillette. Cependant, son genre ne me plaisait pas ; c’était blond outré avec une bouche à la framboise trop marquée. Enfin ! c’était de la mode d’à présent. Mon tort quéquefois, vous le savez, Madame, est de dire ma façon de penser tout franc, tout clair. Alors, je pense tout haut : « Ah ! ben, si c’était ma fille, je vous fouetterais ça ! On n’a pas idée de ressembler exprès à une créature sans honte et sans pitié ! » Alors, Madame me croira si elle veut ; mais la petite s’est retournée, m’a toisée et m’a jeté à travers la figure ; « Mêlez-vous de ce qui vous regarde ! » Madame me connaît assez pour savoir que je n’ai pas voulu me laisser faire la leçon par une gamine. J’ai donc crié plus fort qu’elle, et j’ai riposté : « Oh ! là là… Je dis ce qui me plaît, et je peux donner mon avis sur ce qui ne me plaît pas. Je vous trouve bien osée de vous attaquer à une femme comme moi, qui suis honnête et travailleuse. — Retournez donc à vos fourneaux, bonne femme ! » qu’elle me