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prudence rocaleux

suis une honnête femme et je n’ai jamais rien volé… et je ne commencerai pas à mon âge pas voler un mioche !… Qu’est-ce que vous voudriez que j’en fasse ?…

Puis, elle s’adressa à l’agent qui la sommait de le suivre :

— Pour sûr que non… que je n’irai pas avec vous… j’ voyage pas avec les agents de police… J’ comprends le chagrin de cette malheureuse, mais je n’y suis pour rien !

Prudence donna son nom et son adresse, et quand les agents surent qu’elle était domestique chez M. Dilaret le juge, ils se radoucirent et la laissèrent rentrer chez elle.

Elle y arriva dans un état tumultueux. Sans prendre la peine de retirer son chapeau, elle se précipita dans le studio où elle trouva Mme Dilaret seule.

— Ah ! Madame !

— Qu’avez-vous, Prudence ? Vous me faites peur !

— Ah ! Madame, j’ai volé un enfant !

— Un enfant ?

— Oui… gémit Prudence en se laissant tomber dans un fauteuil.

Elle se releva d’un bond en songeant que ce geste constituait un accroc au protocole.

— Il est ici, cet enfant ?

— Oh ! non… il court !

— Quel âge a-t-il ?

— Deux mois depuis hier…

— Ah ! ça !… expliquez-vous un peu mieux…

— J’étouffe !… je raconterai tout à Madame… Pour le moment, ça m’est impossible ! Madame voit bien que je ne peux pas parler ! Ah ! il s’en passe des choses à Lyon ! Non… prendre un enfant, moi qui était toute mignonne sur mon banc, que c’était à pleurer d’attendrissement… Le temps était beau, le