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Toutes les paroles que j’entendais bruissaient à mes oreilles comme des heurts pleins de résonances. À peine si j’en percevais le sens. Je n’avais plus qu’une pensée, et si malheureuse ! Oh ! si malheureuse !

Je ne sortis pas ce jour-là, n’ayant nul courage.

Maman remarqua :

— Ces jours derniers, tu ne pouvais pas tenir en place, et aujourd’hui tu parais complètement déprimée. Tu deviens bizarre. Il faut te surveiller.

J’eus une inspiration :

— J’ai été fort agitée par l’annonce du mariage de Léo. J’ai eu si peur que sa fiancée ne vous plaise pas ! Aujourd’hui, je suis tellement contente de la connaître avec tant de charme que j’ai une réaction. Je l’avais aperçue, notre Berthe Durand, mais, ne lui ayant jamais parlé, je craignais une surprise désagréable.

— Moi aussi, je ressens une joie inattendue, et je n’espérais pas qu’elle me plairait autant. Il est vrai que j’aurais dû avoir confiance, parce que Léo a toujours eu des goûts raffinés.

Je fus atteinte par ces mots, parce que je songeais que, de même que mon frère, je montrais toujours quelque éloignement pour les choses vulgaires.

Combien j’allais décevoir mon entourage !

Je répondis courageusement :

— Tu sais, maman, on peut ressentir au fond de soi bien de l’attrait pour la distinction et choisir tout à coup un mari ou une femme qui ne réponde pas aux aspirations qu’on a affichées… La personne que l’on a