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— Il faut toujours combattre, se défendre, montrer les dents !…

Un autre jour, j’aurais ri des paroles de mon jeune frère. Ce n’était pas du tout son genre de « montrer les dents », mais depuis que j’avais eu cet entretien avec lui, la veille, je le croyais capable de toutes les sagesses.

— Moi, m’écriai-je avec indignation, je ne puis comprendre qu’on t’en veuille pour une chose aussi juste ! Ce monsieur se doutait bien que tu ne pouvais accepter. Qu’il t’offre une prime pour que tu le choisisses pour ces travaux à effectuer, c’était un risque à courir, mais qu’il te menace à cause de ton refus, ça, c’est inouï.

— Je vois avec plaisir que tu ne t’es pas encore mesurée avec la vindicte humaine, et je t’en félicite, me dit papa. Il y a des caractères qui ne supportent pas qu’on les juge dans leurs faiblesses, aussi indéniables soient-elles, et qui poursuivent alors un but, c’est-à-dire une vengeance, en s’acharnant à découvrir une faiblesse chez celui qu’ils veulent perdre.

— Perdre ! criai-je, comme si on m’étranglait.

— Ou, tout au moins, tourmenter et gêner, atténua papa.

Léo intervint :

— La colère d’un homme peut tomber… La réflexion adoucit souvent la violence.

— La vengeance est aussi un plat qui se mange froid, ajouta Vincent.

Nous nous séparâmes pour aller chacun à nos affaires. Mais cette révélation me rendait