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Hélas ! je me battais avec mon cœur, et cela me paraissait horrible. Je repartis :

— C’est qu’entre sympathie et amour il y a une grande marge, et…

— Vous cherchez de mauvaises raisons, ou alors vous devenez coquette et vous désirez que j’insiste en vous répétant qu’il ne pense qu’à vous. Je suis sûr qu’il est ravi de savoir que Léo va devenir son cousin. Il va profiter de ce nouveau lien pour avancer le rapprochement de vos deux familles. Vous apprendrez qu’un homme qui aime devient rusé.

Ah ! je savais aussi qu’il n’y avait pas que l’amour qui rend rusé ! L’ambition défiait tous les calculs et vous écrasait froidement. Je gardai cependant ces réflexions pour moi.

J’essayai de sourire avec tendresse, avec malice à ma grande amie, mais je ne lui dis pas un mot d’espoir qu’elle pût transmettre à Robert.

Elle me menaça du doigt :

— Je vous croyais une âme sans détours.

J’eus encore un sourire idiot, parce que les larmes me montaient aux yeux.

Je la quittai rapidement pour rentrer à la maison. J’avais le projet de révéler mon « roman » à mère dès mon arrivée. Il fallait en finir.

Mon plan avait été d’abord d’annoncer cette nouvelle devant tous, mais j’estimais maintenant que ce serait moins gênant de l’avouer tête à tête avec maman. Elle était indulgente, et, la première émotion passée, j’étais certaine qu’elle se rangerait de mon côté, puisque je lui assurerais que j’aimais ce jeune homme.