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mariage, ou bien quand tu aurais atteint 21 ans. Tu as trouve un fiancé qui te plaît et qui convient aussi à ton notaire, et nous accomplirons aujourd’hui ce que le devoir nous impose. Tu recevras la visite de Me Bocque, qui t’éclairera sur ta situation financière. » Mon père se tut. J’étais fort émue par ce qu’il me révélait. Je me souviens de leurs bons soins, de leur tendresse et de l’éducation qu’ils essayaient de me donner, en se rappelant celle de ma pauvre maman. Je n’ai pas besoin de vous dire quelle fut ma curiosité concernant mes parents. J’étais avide du moindre détail, et quand Léo est venu, nous déroulions le passé…

Berthe cessa de parler. Nous l’écoutions avec émotion. Maman la plaignit d’être restée orpheline, mais en même temps elle loua les Durand, si sages dans leur conduite et si désintéressés dans leur dévouement.

Léo rayonnait de plus en plus. Il était assis auprès de Berthe et il contemplait sa beauté. Elle était vraiment toute grâce, et ses yeux bruns, si expressifs, étaient une caresse. Ses mains, quoique abîmées par les travaux managers, conservaient leur dessin si pur, et ses doigts effilés jouaient avec les grains d’un tôlier modeste. Son visage éclairait le salon de sa joie lumineuse.

Sauf moi, tout le monde jouissait de cette surprise. Je ne pouvais que déplorer cette nouvelle situation parce qu’elle me précipitait dans un état d’infériorité. Il ne me sembla guère possible de sauter hors du cercle qui se rétrécissait autour de moi.