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Ah ! ces garçons qu’on se figure encore naïfs comme des enfants au berceau et qui prennent des initiatives !

Léo au foyer du concierge de la fabrique Bricat ! J’en aurais pleuré ! Je le voyais, ce père Durand, certainement très sympathique, quand il vaquait dans son quartier, mais odieux depuis que je savais qu’il deviendrait le beau-père de Léo. Il avait une verrue sur le nez, il pliait des genoux en marchant, il n’était jamais bien habillé, mais couvert de vieux vêtements élimés.

Je l’évoquais près de maman, si élégante, et née de Chalumet. Quel contraste !… Nous le considérions comme un homme digne, oh ! tout à fait, mais loin de notre monde !

Je me disais, en m’acheminant vers la maison, que j’aurais beaucoup de mal à observer le silence. Cependant, ce n’était pas à moi de parler la première. Cela regardait mon frère avant tout. Je m’étais lancée, riante, hors de notre demeure, et je me sentais agacée maintenant… Ma nature était de ne rien garder d’obscur dans mon esprit, et il fallait que j’enfouisse un ennui au plus profond de mon cerveau.

— C’est moi ! annonçai-je en franchissant notre seuil.

J’allais vers le salon, où maman se tient d’habitude.

— Bonjour, maman !

— Bonjour, ma petite fille…

— Tu as reçu tes dames d’œuvres ?

— Mais oui, et nous nous sommes entendues sur tous les points…