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— J’espère que tu ne garderas pas le silence et que tu sauras faiire comprendre à ce monsieur…

— Comment, c’est toi qui me suggère une telle altitude ?… interrompit Bertranne avec éclat… Tu ne voudrais pas que je défendisse ma cause ? Quand un homme ne vous aime pas, à quoi bon lui dire qu’on est éprise de lui ? Tu prévois ce que serait ce doute toute une existence ? Penser que j’aurais forcé une volonté ! non, je serais incapable de le supporter. S’il ne m’aime pas, je resterai avec mon désespoir… Tu me plaindras, tu me consoleras, toi qui veux devenir une sainte. Comme je t’envie ! Tu vas à travers les heures comme une âme entêtée en te persuadant que tu n’aimeras pas, sous le prétexte simpliste que tu t’y refuses…

— Je t’ai enviée aussi, quand je te voyais si sereine dans l’étude. Jamais je n’aurais cru qu’en si peu de temps tu deviendras une esclave.

— Tu as raison… et l’esclave d’un sentiment, c’est plus pernicieux que d’être asservi à une besogne routinière, parce que l’esprit est annihilé complètement. J’accomplis tous mes gestes automatiquement, ma pensée est rivée à un point d’où elle ne s’échappe pas.

— C’est une hantise, murmura Christiane.

— Et une hantise dans laquelle je me complais, bien que j’essaie de m’en arracher… Quelle lutte ! Mais