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l’ombre s’efface

— Comment est-elle morte ?

— Il paraît qu’elle a été heurtée par une auto et qu’on l’a relevée avec une fracture du crâne. Elle n’a pas repris connaissance.

Puis, brusquement, Mme Saint-Bart changea de ton :

— Quelle conversation, chère petite madame ! Vous m’obligez à ne vous raconter que des tristesses !

— C’est que Mme de Sesse m’intéresse tellement ! Tout ce qui la touche m’est précieux.

— Je le constate.

— Avouez qu’il y a là une fatalité rare. Je comprends mieux l’air accablé de votre amie. Des coups pareils peuvent laisser une trace qui a du mal à s’effacer.

— Oubliez-les et reprenez votre calme.

Je ris un peu nerveusement, parce qu’au fond de moi, ces quelques explications ne me suffisaient pas et j’aurais voulu questionner à l’infini. Tous ces épisodes me paraissaient tellement extraordinaires que j’avais beaucoup de mal à croire à leur vraisemblance. Cependant, je ne pouvais réfuter les assurances que l’on me donnait.

Mme Saint-Bart était digne de foi, et les de Sesse ne m’avaient rien confié, si ce n’était la perte toute naturelle de leur enfant. Je n’avais aucun titre à creuser plus avant.

Mme Saint-Bart changea de conversation. Le sujet semblait lui déplaire parce qu’elle aimait la gaîté. Je crus comprendre qu’elle l’avait abordé pour éviter que je ne dise une parole malencontreuse à son amie. Avec mon peu d’expérience et mon manque de prudence, il était possible que j’eusse commis quelque impair. Quand on ignore certaines particularités, il devient facile de tomber dans l’erreur.

— Aimez-vous la danse ? me demanda à brûle-pourpoint ma visiteuse.

Si j’aimais la danse ! Je me sentis rougir, et Mme Saint-Bart se méprit sur cette rougeur.

Elle ajouta en riant :

— Je n’ai nul besoin d’entendre votre réponse : je vous sens pleine d’enthousiasme, rien qu’à l’énoncé de ma demande.

Je me remettais, en cherchant pourquoi ma nou-