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nous accoutumer à notre joie. Comme j’étais primesautière, j’étais la moins embarrassée et je parlais presque en dansant. J’allais de mon père à ma mère comme un oiseau ivre de printemps. Puis soudain, je m’écriai :

— Et Jacques ?… J’ai un mari, mes chers aimés ; il faut que je lui téléphone pour lui annoncer que j’ai des parents !

— Mais oui ! À quoi pensions-nous ! s’exclama ma mère en riant. Nous avons dit que nous l’inviterions à dîner…

— Oui, nous jouirons ainsi de sa surprise, appuya mon père.

Le temps passa vite avant l’arrivée de Jacques. Il paraissait tout inquiet, mais à la vue de nos visages épanouis, il eut un sourire pour demander :

— Qu’est-ce qui se passe ?

Nous lui répondîmes par un rire joyeux.

Il nous contempla tour à tour, sans un mot, et je m’écriai gaîment :

— J’ai enfin retrouvé ma famille !

Ses yeux m’interrogèrent avec un peu d’effroi :

— Votre famille ?

— Eh oui ! un père et une mère.

Et, désignant M.  et Mme de Sesse, je dis :

— Les voici…

Jacques ne comprenait pas et il demanda :

— Vous avez adopté ma femme ?

Il supposait que leur affection pour moi avait poussé leurs sentiments à me considérer comme leur fille.

— Non, non, accentuai-je avec force, je suis Christine de Sesse par la naissance.

Il passa la main sur son front et murmura :

— Est-ce que j’entends bien ?

À partir de ce moment-là, nous parlâmes tous à la fois pour lui expliquer la vérité. Il l’écouta, non sans émotion, et quand nous nous tûmes, épuisés, il murmura :

— Ce qui me confond, c’est de penser que Christine soit précisément votre fille. Son destin l’a acheminée vers moi, vers vous, afin de la conduire là où était sa place. Bénissons la Providence. Les chemins