Page:Fiel - L'étonnante journée, 1932.djvu/16

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

— Moi, intervint Suzette, je veux bien donner ma tirelire, pour payer des carottes que je n’aime pas ; ce sera un sacrifice qui rendra très content le petit Jésus…

— Ah ! ben, vous pouvez parler du petit Jésus, je vous le conseille… Il est honteux de vous…

Heureusement pour la cuisinière, elle était si bien considérée par les fournisseurs que ses carottes lui furent rendues sans difficulté. Il est vrai qu’un commis assura qu’il avait vu la petite demoiselle prendre les légumes du panier de Justine pour les replacer parmi les autres.

La cuisinière ne se fît pas faute de raconter la malice de Suzette qui obtint un succès de mauvais aloi qui ne la flattait nullement. Mais il lui fallait subir les suites de son acte et elle opposa un visage sérieux aux sourires qui convergeaient vers elle.

Justine n’avait plus qu’une course : aller à la poissonnerie. C’était pour les enfants un endroit de délices. On voyait des poissons vivants qui s’ébattaient dans les bassins, et Suzette et Bob, le nez écrasé contre les parois de verre, seraient restés là pendant des heures sans avoir conscience du temps. Justine était obligée de les arracher de force à leur contemplation.

Elle les prévint avant d’entrer :

— Nous sommes en retard. Quand j’aurai