Page:Fiel - L'élève Bompel, 1947.pdf/52

Cette page a été validée par deux contributeurs.
50
marthe fiel

— Bompel, promettez-moi de ne pas apporter de trouble dans votre classe… Vous devez comprendre quelle tâche ingrate a votre professeur… Vous vous amuserez à la récréation et ainsi tout le monde sera content…

À quoi Nil répliqua :

— Le professeur nous a lu une fable où il s’agissait d’un meunier, de son fils et d’un âne… la morale était qu’il était impossible de contenter tout le monde…

— Vous avez de la mémoire et de l’à-propos, élève Bompel, mais il ne faut pas trop en faire usage, vis-à-vis de vos supérieurs…

— Que veut signifier : supérieur ? demanda Nil avec le plus parfait naturel.

Interloqué, le directeur chercha une formule appropriée.

— C’est une personne qui a plus de raison, plus d’expérience, plus de savoir… Je n’ai pas besoin de vous apprendre que vous comme élève, moi comme directeur, je suis votre supérieur…

— Oui, convint Nil, vous êtes un peu plus âgé que moi, mais nous sommes entre hommes, et nous pouvons dire que seuls sont inférieurs ceux qui ne sont pas intelligents…

Le directeur fut tellement désarçonné par cette profession de foi, que le sérieux auquel il se contraignait disparut sous une gaîté débordante.

Deux années passèrent et Nil eut neuf ans. Il était dans la classe de sixième et ses camarades restaient les mêmes. Ils obéissaient toujours à l’impulsion donnée et continuaient de s’amuser aux dépens de Nil. Ses parents étaient désolés qu’il n’eût jamais de récompenses à la fin de l’année. Il aimait apprendre, cependant, mais il s’irritait de voir que ses moindres paroles n’étaient jamais prises au sérieux.