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l’élève bompel

— Huit années, c’est beaucoup, monsieur, quand on entend parler ses parents et leurs amis, et qu’on retient ce qu’ils disent…

— Vous êtes un phénomène… Regardez-moi comme si vous regardiez votre professeur en train d’enseigner.

— Voici…

Nil prit la pose. Le directeur eut devant lui une tête ronde aux yeux attentifs, un nez aux narines mobiles qui semblaient flairer le vent et une bouche spirituelle, toute prête à réfuter une idée, mais qui retenait l’ironie bondissante.

— Évidemment, murmura le directeur, avec un sourire, il y a matière à provoquer une certaine agitation.

Plus haut, il ajouta :

— Votre visage est trop indicatif… On peut y lire vos pensées, surtout parce que vous voulez les signaler par une mimique expressive… Il faudrait vous efforcer d’avoir un visage plus rigide…

— Comme ça ? demanda Nil.

Les yeux lointains, la bouche serrée, le jeune garçon semblait de pierre, mais, bien qu’il s’appliquât, les lèvres dans leur pli conservaient cette mystérieuse expression, cet appel à l’attention qui n’attendait qu’un déclic pour déchaîner l’allégresse.

Le directeur, l’ayant observé un moment, dit en le regardant :

— Cette faculté que vous avez provient de la conformation de votre bouche, aidée par votre esprit déductif, caustique, mordant…

Le directeur s’arrêta et murmura comme pour soi :

— J’oublie que je parle à un enfant…

Puis tout haut :