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marthe fiel

Malgré le manque d’habitude scénique, les artistes montrèrent beaucoup de maîtrise.

Le jeune garçon travesti en jeune fille eut un succès mérité. Les applaudissements ne lui manquèrent pas. Il chantait un couplet, et comme sa voix était agréable, on ne lui ménagea pas les bravos.

Les invités eurent le bon goût cependant d’être im­partiaux. L’admiration fut distribuée également. Se sentant stimulés, les jeunes comédiens jouèrent avec brio et réussirent au delà des prévisions. Nil s’amusait franchement. Il ne connaissait pas la pièce et s’était réservé la joie de la surprise. Il admirait ses amis qu’il trouvait parfaits dans leurs rôles et il se disait que jamais il n’aurait pu les égaler.

Quant à Legrise, il était fort dépité. En voyant ce succès, en entendant ces louanges, il regrettait de n’avoir pas tenu bon pour obtenir sa part des félicitations.

Quand, à l’issue de la représentation, les éloges éclatèrent plus nourris et que chacun eut son ovation, sa fureur intérieure fut à son comble.

Il chercha des défauts au jeu qu’on louait et tenta de faire partager ses critiques à quelques jeunes garçons venus avec leurs parents, mais il ne trouva pas d’écho. C’étaient d’excellents voisins et un bon public.

Il aurait voulu se venger, mais c’était difficile. Il ne pouvait s’attaquer à Nil au milieu d’une foule, mais il s’y risqua cependant en se voyant subitement en face de lui.

— Tu n’as pas assez de cette salle empoussiérée ? Tu ne viens pas faire un tour avant que l’on goûte ?

— Non… merci !

— Viens donc, j’ai des cigarettes…