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ner, je n’y penserai plus. Merci encore et au revoir, monsieur.

— Je ne suis pour rien dans cet heureux hasard…

Je crus bon de quitter ma bouée de sauvetage, en l’espèce monsieur Chaplène ! Quelle aventure ! Je tremblais encore, mais c’était beaucoup plus d’émotion que de la secousse ressentie.

Il parlait de hasard. Moi je disais la Providence. Elle m’avait réservé là une bonne entrée en matières. Gustave ne pourrait pas faire autrement que de demander de mes nouvelles. Si je lui plaisais, le questionnaire quotidien sur ma santé pouvait durer autant qu’il le jugerait nécessaire.

Cette joyeuse perspective me guérit immédiatement de mes courbatures. De ma chute, je ne gardais que le souvenir d’un parfum de cigarette et de je ne sais quel extrait de fleur, que j’avais respiré sur cette veste d’homme.

Je déjeunai rapidement et j’allai prendre mon café sur la terrasse. Je n’y étais pas installée depuis cinq minutes que monsieur Chaplène vint à moi. Sa voix résonna, claire, camarade, bon enfant :

— Alors mademoiselle, cet accident ne vous a pas coupé l’appétit ?

— Absolument pas ; je n’y pense plus du tout.

— Ce qui prouve votre souplesse.

— Et votre esprit d’à-propos. Je n’ose penser à ce qui me serait arrivé si vous aviez été seulement un mètre plus loin.

Il y eut un léger silence, suffisant pour souligner un peu d’embarras de part et d’autre. Mon émotion était naturelle et mon sauveur se demandait sans doute qui je pouvais bien être. Je lisais

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