Page:Fiel - Coups de foudre, 1947.pdf/68

Cette page a été validée par deux contributeurs.

encore prendre ses vacances. Enfin j’espère, demain, pouvoir vous présenter à mes oncles qui, certainement, vous plairont beaucoup. L’un est général en retraite, l’autre notaire ; je suis sûre qu’ils apprécieront votre esprit sérieux.

Quelle déception !

Mon compagnon, cette fois, devint livide. Par bonté d’âme, je ne le lui fis pas remarquer. L’air absorbé, il regardait obstinément le sol. Je n’eus aucun doute sur ses pensées : il se demandait par quel train il fuirait.

Il devait également maudire les deux protecteurs qui survenaient si malencontreusement et m’empêcheraient de lui remettre l’argent qu’il convoitait. Peut-être se trouvait-il maladroit d’avoir dévoilé si rapidement ses aptitudes à faire main basse sur les finances des jeunes dindes…

Je riais intérieurement, en me complimentant sur mes débuts en diplomatie. L’attitude de René Déflet me faisait sentir que j’avais bien réussi. Je n’avais, aucune honte à avoir ainsi joué la comédie puisque les circonstances m’y avaient poussée et, pour ainsi dire, forcée. Mais que serait-il advenu de moi si je n’eusse pas sympathisé avec ma petite femme de chambre ?

Déflet sortit de sa torpeur pour articuler d’une voix rauque :

— Je serai enchanté de faire la connaissance de votre famille. Toutefois, je ne vous cacherai pas que notre solitude me plaisait infiniment. Ces messieurs arrivent demain ?

— Leur dernière lettre me le confirme.

La voix de mon soupirant n’avait plus cette suavité si prenante qui la distinguait entre toutes.

— 66 —