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der avec lui cinq minutes, ne fût-ce qu’à titre de distraction. Je répondis donc au garçon que M. Tramaillac, puisque Tramaillac il y avait, pouvait me rejoindre sur la terrasse où effectivement j’allai m’asseoir. Mon solliciteur ne tarda pas. J’avais à peine déplié un journal que j’apercevais devant moi un homme bedonnant et trapu, au visage glabre, dont les yeux, brillants comme des escarboucles, me dévisageaient avec complaisance.

Tramaillac s’inclina solennellement et déclara sans autre préambule :

— Mademoiselle, vous représentez le type idéal que je cherche.

Je demeurai bouche bée. Je n’avais aucune habitude des déclarations d’amour ; mais mon intuition me donnait à croire qu’elles étaient généralement plus voilées, tout au moins dans leur premier envol. En outre, je ne me voyais pas du tout épousant ce poussah.

Je pris le parti de me taire et j’attendis la suite, tout en me drapant dans une dignité quasi polaire (c’était le cas où jamais !).

— Oui, mademoiselle, reprit mon admirateur, je cherche une star pour mon prochain film et…

Je faillis jeter un cri de soulagement, de surprise et de curiosité tout à la fois. Cependant, M. Tramaillac poursuivait :

— Vous incarnez merveilleusement le personnage de mon héroïne. Êtes-vous de la partie ?

D’un seul mot j’anéantis ses espoirs.

— Non, monsieur…

Il « encaissa » le coup avec galanterie.

— Vous me surprenez, mademoiselle, mais je suis d’autant plus fier de vous avoir rencontrée… Car vous serez ma création, ma découverte…

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