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retour, je quitterai vraisemblablement cette pièce où j’avais été parfois si simplement heureuse. Cette idée me remplissait d’une certaine mélancolie. J’étais accoutumée à mon logis exigu, mais un appartement plus grand serait plus confortable et je prendrais avec moi une petite jeune fille qui m’aiderait à tenir mon ménage.

Je prévoyais bien quelques soucis avant que ma nouvelle existence ne fût organisée et je me demandais s’il serait sage de quitter ma situation. L’appoint qu’elle m’apportait me serait d’un grand secours tant que je resterais célibataire.

Le proverbe assurant qu’il vaut mieux faire envie que pitié me vint à l’esprit. Je le trouvai parfaitement faux, si le principe de charité est admis. La pitié, en effet, prédispose chacun en faveur des misérables, tandis que l’envie ne suscite que de mauvaises pensées.

Être enviée ne peut être une source de félicité, puisque l’on découvre la bassesse de ses semblables tandis que la pitié donne naissance à des actes généreux et exalte les hautes qualités du cœur.

C’est en remuant toutes ces pensées que j’arrivai à la gare où la foule m’ahurit. Je ne me doutais pas que tant de gens avaient eu, en même temps que moi, la fantaisie de prendre le train.

Je ne connaissais pas plus Aix-des-Bains qu’une autre ville, mais comme j’en avais beaucoup entendu parler au bureau, elle m’avait paru plus accessible. Il me semblait que tous les agréments devaient y être réunis. Car je désirais une villégiature animée. Je ne me serais pas distraite dans un

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