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qu’on a agi en ne sachant pas, et que, sachant, on ne peut plus agir, à quoi bon s’exclamer ainsi ? Si nous savions tout d’avance, la terre ne serait peuplée que de gens heureux et « arrivés ». Nous avons commis un impair, je vous le concède, mais, du moment que ce monsieur ne connaît ni votre nom, ni même votre existence, l’honneur est sauf. Vous n’avez plus qu’à tirer l’échelle, comme dit mon fiancé, ou à passer l’éponge si vous préférez. Nous avons voulu employer des méthodes modernes. Le résultat nous prouve que tout, dans ces méthodes, n’est pas à retenir. Oubliez ce mince épisode, légère fumée qui se dissipera vite.

— Mince épisode me paraît un charmant euphémisme. C’est tout bonnement ma vie qui se détraque.

— Pas de grands mots ; Votre vie n’est pas commencée ; puis, quand on possède un million inattendu, on a devant soi un avenir souriant.

— Parlons-en ! Gustave n’y a guère été sensible à mon million, que je sache !

— Eh, non… et c’est cela qui rachète son refus à mes yeux car il a dit, assure mon chef : « Cette jeune personne se figure-t-elle que je vais l’épouser rien que pour son million ? Elle se trompe absolument. Je veux une femme qui me plaise avant tout, et, ensuite seulement, je m’inquiéterai de sa fortune.

Je me mordis les lèvres et je hurlai :

— Que nous avons mal joué ! c’est affreux, affreux…

J’étais dans un fureur indescriptible. Je piétinais sur place. J’aurais voulu casser quelque chose et la pauvre Pauline ne cessait de répéter :

— Calmez-vous… calmez-vous.

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