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dre au siège de la Loterie. Il faut que je sois au plus vite convaincue que je n’ai pas rêvé. Si l’on me disait, par exemple, qu’il y a erreur de chiffre ?

Cette hypothèse galvanisa Me Praquet qui sonna son première clerc.

— Je sors.

Il prit son chapeau, parce que je lui rappelai qu’il l’oubliait, et nous partîmes. Je riais sous cape. Je m’étais critiquée d’avoir été bouleversée par ma chance, mais je constatais que mon notaire, homme de sang-froid par définition, l’était autant que moi.

Au siège de la Loterie, je passai devant les guichets en distribuant à droite et à gauche des sourires et des regards à faire flamber tous les billets de banque que j’avais gagnés. Un petit homme à figure de belette, après maintes vérifications, me confirma dans mon bonheur. Le front de Me Praquet ruisselait de sueur. En sortant, le brave notaire m’offrit un rafraîchissement que j’acceptai. Il me fit entendre que sa femme, qui m’aimait beaucoup, assurait-il, m’enverrait une invitation à dîner, un prochain soir.

— Cela me changera un peu de ma solitude ! rétorquai-je avec un peu de malice.

— C’est que j’aurai des placements à vous soumettre, corrigea-t-il pour masquer sa nouvelle sollicitude.

Évidemment, je ne pouvais prétendre à un dîner quand j’étais dénuée de tout.

— Vous ne serez pas étonnée si, à ce dîner, vous rencontrez un neveu de ma femme, un garçon charmant qui partage souvent notre repas de famille.

Je montais rapidement en grade ! Je gagnais déjà un excellent dîner gratis… Alors que j’étais pauvre,

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