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votre fiancé ? Vous me l’avez assuré pourtant ?

— C’était différent, ma nièce… je ne connaissais pas la vie… je croyais tous les hommes vertueux… maintenant, j’ai de l’expérience, et je veux t’épargner une école douloureuse…

— Ma tante, vos sentiments sont parfaits, mais je répète que je ne voudrais point faire souffrir un galant homme. J’aimerais essayer mes griffes sur quelqu’un de peu plaisant. Il ne faudrait pas qu’à chacun de mes coups, je souffrisse moi-même en l’assénant.

— Ma nièce, il faut t’apprendre à trouver tous les hommes peu estimables… et tu seras cuirassée contre une fausse sentimentalité. Mais je suis quelque peu étonnée de t’entendre parler de tes souffrances présumées. Aucun homme ne les mériterait…

— Je ferai tout mon possible pour être d’airain…

Armelle eut un soupir que Mlle  de Saint-Armel perçut.

— Pourquoi soupires-tu ?

— Je vivais dans la paix de l’insouciance, et maintenant, je suis tourmentée…

— Et pour quelle cause ?

— Je crois que je me sens un cœur…

— Quelle idée ! tu as aussi une volonté, n’est-ce pas ? où en serions-nous, pauvres femmes, si la volonté ne primait le cœur.

— Ma tante, je vous promets d’étouffer le mien…


VIII


Armelle dormit bien mal cette nuit-là.

Elle se demandait comment il mouvait se faire que Gontran Solvit entrât dans le vieil hôtel de famille.