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Mlle Roudaine disait-elle que cette jeune fille ne se marierait pas ?

— Vous vous promenez, monsieur ? demanda le marquis avec affabilité, sans savoir au juste ce qu’il proférait, dans la surprise de la rencontre.

— Je sors de chez M. Roudaine, qui a de bien jolies choses, répondit étourdiment l’artiste.

Le visage d’Armel le pâlit subitement et sembla rentrer dans l’ombre, tellement il devint incolore. Une crispation rapetissa les traits.

Gontran nota ce changement avec étonnement, puis, une joie l’irradia, parce qu’il avait compris :

« Elle était jalouse. »

Ah ! qu’il aurait voulu la rassurer, la réconforter, lui prouver qu’elle seule comptait ! Il ne pensait pas à l'orgueil de la conquête, il ne voyait que sa douleur à elle qui changeait son visage.

Ainsi, elle l’aimait. Son âme resplendit. Il devint gai, expansif, eut des mots d’esprit.

Elle le regardait, morne. Elle ne devinait pas d’où lui venait sa joie et elle lui en voulait de le voir si charmant. Elle ne pouvait que s’imaginer qu’il avait vu Cécile, causé avec elle, et une torture l’accablait. Une lame aiguë s’enfonçait dans son cœur, et elle tremblait de la tête aux pieds.

Elle essayait de sourire, mais elle sentait qu’elle n’y parvenait pas.

— Monsieur, disait le marquis, je vous ai prié aussi de venir chez moi. Je n’ai pas les splendeurs de mon voisin Roudaine, n’étant pas collectionneur. Je me suis contenté de conserver ce que mes ancêtres m’ont légué.

— Je suis sûr, monsieur, que vous possédez des merveilles.