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Elle se remémorait les gestes des trois jeunes filles quand elles tenaient leurs cigarettes. Elle essayait de les imiter en lançant vers le plafond de» spirales de fumée imaginaire. Sa tante était dans le salon avec une dame d’œuvre pour s’occuper de comptes qui dureront quelques heures. La jeune Armelle était rentrée dans sa chambre où elle devait ourler des fichus pour les poupons d’une crèche.

— C’est un sacrifice que tu feras, de manier ces petites choses misérables, lui avait dit sa tante, mets-y tout ton cœur…

Armelle observe qu’il lui est ordonné de mettre du cœur partout, sauf dans une affection pour un jeune homme.

Elle médite : ma tante n’avait donc pas beaucoup de cœur pour défendra à son fiancé de fumer. Ah ! M.  Solvit pourrait fumer autant qu’il le voudrait, je ne l’empêcherais pas.

Et la cigarette roulait entre ses doigts blancs. Bientôt Armelle n’y tint plus et prenant brusquement uns allumette, elle alluma le tabac blond qui sortit odorant de son enveloppe de papier.

Elle en aspira une bouffée avec un battement de cœur, puis deux. Elle n’y trouva aucun mal. « Pourquoi donc ma tante a-t-elle défendu ce divertissement si simple à son fiancé ? » On est tranquillement dans un fauteuil, on aspire un peu de fumée et on la lance devant soi… C’est tout. Où est le péché ? Ma tante me raconte des choses qui me font penser à d’autres choses… et me font acquérir de l’audace. Je fume, moi Armelle ! C’est épouvantable.