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cruels et capricieux. Ils s’attachent à vous par orgueil.

Armelle tressaillit. M. Gontran Solvit serait peut-être flatté d’entrer dans sa famille. Si c’était pour ce motif seulement qu’il l’aimait ?

Ces paroles insidieuses eurent l’effet d’un poison. La jeune fille se sentit tout à coup la force de repousser l’homme indigne, qui l’encenserait pour parvenir au mariage, qui la comblerait de paroles de tendresse et qui, maitre de la situation, deviendrait un mari tyrannique à qui tout appartiendrait.

Non… non… Sa tante avait raison. Il valait mieux vivre seule et se moquer des hommes. Mais il fallait en faire souffrir au moins un.

Elle prononça lentement :

— Je suis tout à fait décidée, ma tante, à accepter le premier prétendant à ma main. Il ne s’agira pas pour moi de l’épouser, mais de le lui faire croire, pour le renvoyer ensuite. Je veux qu’il souffre comme vous avez souffert.

— Ma chère petite enfant ! Je juge que Dieu t’a mise à mon côté pour ce devoir…

— Vous le croyez vraiment, ma tante ? Je m’imagine Dieu si bon, que je ne puis supposer de pareilles vues de sa part. N’a-t-il pas recommandé expressément ; Aimez-vous les uns les autres ?

Mlle de Saint-Armel ainée se mordit les lèvres.

— Ma chère petite, prends donc les choses simplement… reprit-elle bientôt.

— Je ne demande pas mieux, chère tante, mais pourquoi trouvez-vous simple ce qui me semble compliqué ?

— Ah ! que j’ai eu tort de te faire connaître ces jeunes filles !