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ÉPREUVES MATERNELLES

Vincente fut assez décontenancée par cette réponse. Marie Podel ne lui semblait pas de la même essence que celles qui l’avaient précédée.

— Enfin ! il faut vous prendre comme vous êtes, je vais prévenir Madame que vous êtes rentrée.

— Prévenez-la que je désire lui parler et que je ne resterai sans doute pas.

— Quoi… vous voulez repartir ?

— C’est mon intention.

— Ça, par exemple, ce n’est pas naturel… Écoutez, Marie, je suis sûre que vous partez parce que vous croyez qu’il se passe des choses extraordinaires dans cette maison… Vous auriez tort… Vous pouvez croire ce que vous voulez, c’est votre droit (nous vous avons bien accusée de vol), mais je vais vous expliquer la chose : les gémissements que vous entendez, c’est monsieur, le père de Madame, qui les pousse. Il est tombé en enfance et cela m’est un crève-cœur de le dire, parce que je l’ai connu actif et allant… Alors, je ne veux pas qu’on le voie et je le soigne seule avec Madame. Il ne peut plus bouger, le pauvre.

Le bon cœur de Marie s’émut.

— Le pauvre homme ! s’écria-t-elle, comme ce doit être triste pour sa fille.

— Elle a du mal à s’y habituer, et elle l’aime maintenant comme son enfant. Alors, vous êtes tranquille ? vous voyez qu’on ne vous cache rien, vous resterez ?

— Non, Vincente.

— Oh ! même après ce que je vous ai dit ?

— Il faut que je parte.

— Quelle bizarre cuisinière ! cria Vincente hors d’elle, les femmes sont stupides à présent ! c’est une pitié ! Ah ! bien, Madame va être contente ! Il va falloir courir pour retrouver quelqu’un d’autre. Pourquoi êtes-vous entrée ici, pour repartir aussi vite ? Vous ne faites pas long feu dans vos places ! Madame ne vous paie pas assez ?

Denise subissait ce déluge de paroles sans protester.

Vincente s’en alla pour avertir sa maîtresse et ce fut au tour de Madame Dutoit de manifester quelque fureur. Elle vint trouver Denise.

— Que me raconte Vincente ? Vous ne voulez plus rester à la maison, ma fille, après m’avoir joué ce