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ÉPREUVES MATERNELLES

Paul Domanet, dans cette circonstance était logique, mais sa dureté l’était moins.

Denise se tut. Elle jugeait inutile de se défendre, et d’alimenter des propos aussi oiseux, dont elle sortait amoindrie chaque fois.

Il était l’heure du dîner et elle songea à s’occuper du repas.

Il la laissa se diriger vers la cuisine.

Elle rassembla ses idées pour confectionner un plat qui plût à son mari. Elle se retenait de pleurer, elle se disait qu’elle avait obtenu une grande amélioration et que son courage était récompensé. Cependant son cœur n’était pas tranquille. Elle se hâtait pour ne pas laisser ses enfants seuls. Elle prêtait l’oreille afin de les entendre. La voix de Richard s’éleva :

— Mais je n’ai pas de joujoux !

Il y eut un murmure de cris joyeux, puis des portes s’ouvrirent et se refermèrent.

Denise eut un sourire léger. Elle continua son humble besogne, prise d’un zèle soudain :

— Si la face de la vie pouvait changer, se dit-elle.

Un quart d’heure passa durant lequel Denise absorbée, remua des ustensiles.

Soudain, l’appartement lui sembla terriblement silencieux. Elle sortit de l’office rapidement, tendit toute son attention, mais ne surprit aucun symptôme animé dans l’appartement. Elle appela, les bras enavant, les yeux égarés. Alors, elle comprit l’horrible chose.

Paul Domanet avait remmené ses enfants.

Elle sanglota désespérément, se demandant comment elle pourrait supporter son destin. Durant deux heures, elle escompta le retour, mais les minutes s’ajoutèrent aux minutes. Elle n’en pouvait plus de gémir. Sa gorge ne laissait plus passer qu’un râle sourd, et elle se disait que dorénavant, il lui serait impossible de demeurer en face de Paul Domanet.

Quoiqu’il pût advenir, elle s’en irait.

Elle sécha ses larmes, se baigna le visage, revêtit son manteau et prit le peu d’argent liquide qu’elle possédait.

Quand elle eut fini ses préparatifs, elle murmura :