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ÉPREUVES MATERNELLES

Il usa de la force. Comme la veille, il l’entraîna et la conduisit vers la cuisine, malgré sa résistance.

Là, dominée, elle dut, sous ses ordres, procéder aux préparatifs d’un repas simple, qu’ils absorbèrent dans l’office, en face l’un de l’autre.

Denise pouvait à peine avaler, mais le peu qu’elle prit, rendit de la clarté à son esprit.

Elle décida qu’elle accepterait la situation afin de revoir ses enfants. Elle se résignerait à tout pour entendre encore leurs voix à travers l’appartement. Elle dut, après ce repas, s’occuper du nettoyage des ustensiles. Son mari fumait une cigarette en lisant son journal.

Puis elle balaya, rangea, pensa au menu du soir.

Et ce fut ainsi tous les jours.

Involontairement, elle songeait aux travailleuses sans espoir d’une vie confortable. Elle rougissait d’avoir fait si peu de cas de l’argent.

Elle se couchait harassée, après avoir supplié son mari de la renseigner sur le sort de ses chers trésors. Mais Domanet ne lui donnait aucune indication précise.

Les nerfs à bout, elle gémissait et se retenait pour ne pas maudire la vie. Le grand exemple de son frère était son seul soutien. Elle se rappelait ses conseils et sa certitude de la voir, quelque jour, indemnisée de toutes ses souffrances.

Chaque soir, elle se promettait de ne pas recommencer la vie de la veille, et chaque matin, terrorisée par les menaces de Paul, et enflammée par l’espoir de revoir Richard et Rita, elle reprenait le monotone labeur.

Des jours passèrent. Elle ne sortait pas, s’y refusant malgré les offres de Paul. Vêtue comme une femme d’humble condition, il l’aurait emmenée loin de leur quartier, mais elle résista et lui n’insista pas.

Il rapportait les provisions qui avaient besoin d’être renouvelées et il n’en souffrait pas. Cela lui rappelait le temps de sa jeunesse laborieuse et économe.

Il se passa quinze jours, et Denise, à bout de patience pensa qu’elle tomberait malade si cette situation se prolongeait.

Nul indice ne lui avait révélé l’adresse de ses chers