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ÉPREUVES MATERNELLES

— Mon mari me téléphone que vous pouvez promener les petits.

La cousine Zode triompha. Une lueur railleuse s’alluma dans son regard.

Richard observait sa maman sans dire un mot. Denise prépara les enfants pour sortir. Pendant que sa mère lui boutonnait son manteau, le petit garçon lui dit à l’oreille :

— Tu sais, maman, c’est cousine Zode qui a téléphoné à papa pour lui dire que tu ne voulais pas que nous allions nous promener avec elle.

— Tais-toi, mon chéri.

— Je n’aime pas aller avec cousine Zode.

— Il faut y aller puisque papa l’a dit.

— Pourquoi donc ne te promènes-tu jamais avec nous ?

Denise soupira. Jamais son mari ne lui avait permis de se livrer à ce doux passe-temps. M. Domanet trouvait que le rang qu’il donnait à sa femme n’était pas compatible avec un semblable devoir bon pour les petites gens. Denise eût voulu parfois s’en aller seule avec ses chers trésors, mais quand elle y faisait allusion, son mari la persiflait en disant :

— Ce sont des idées de bonne d’enfant… Laissez ces manières à celles qui n’ont pas les moyens d’avoir une nurse. Vous seriez montrée du doigt par nos relations, si on vous rencontrait dans ce rôle.

Denise n’osait pas braver cette défense et cette raillerie.

Les deux enfants sortirent donc sous la conduite de la cousine Zode exultante. Denise les suivit du regard dans la rue. Les deux petits se retournaient pour lui envoyer des baisers.

Il y avait à peu près vingt minutes que Denise était seule dans le petit boudoir où elle se réfugiait toujours, quand son mari entra.

Elle en fut surprise, car il était rare qu’il revînt au milieu de la journée. Cette rentrée lui apparut de mauvais présage.

Il lui vint soudain que la cousine Zode était absente avec Richard et Rita, intentionnellement, en prévision de cette visite.

— J’ai à vous parler sérieusement, commença Paul.

Sa femme le regarda avec inquiétude.