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ÉPREUVES MATERNELLES

XII


Les contusions et le bras cassé eurent des conséquences plus graves qu’on ne le supposait.

Les docteurs ne jugèrent pas utile d’alarmer la jeune femme qu’ils savaient de santé fragile depuis quelques mois.

Paul Domanet avait eu une commotion sérieuse à la tête. Des troubles de la mémoire et de la vue se produisaient. Il parlait sans arrêt pendant ses accès de délire.

Denise l’entendait qui prononçait son nom et une angoisse l’étreignait chaque fois. Était-ce un appel, un remords ou encore de l’aversion ?

Les jours passèrent après les jours. La fièvre diminua, puis remonta. Le malade fut mieux et de nouveau plus mal. Son organisme luttait de toute sa forte vitalité.

La jeune femme assistait à ces phases avec une compassion véritable. Elle écoutait Paul qui jetait de temps à autre maintenant, des mots sans suite que l’on comprenait à peine. Elle guettait avec anxiété le réveil de l’intelligence.

Un soir enfin, il murmura une parole d’une voix lucide : pardon.

Denise la recueillit avec une sorte de religieuse angoisse. Que signifiait ce mot ?

Le docteur qui était penché sur lui à ce moment, crut que son malade s’excusait, en homme du monde, de la peine qu’on prenait pour le soigner.

Il répondit jovialement :

— Vous pardonner quoi… cher ami ?

Mais l’inconscience avait repris le blessé et ce ne furent plus que des phrases incohérentes qui sortirent de ses lèvres.

Denise voyait plus loin. De son âme éprise de justice, elle s’imagina que Paul se repentait et ce mot était, dans son manque de conscience, un réflexe de ce qui le tourmentait.