Page:Feuerbach - Qu'est-ce que la religion ?,1850.pdf/66

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
54
RÉPONSE À UN THÉOLOGIEN

façon illogique et avec fanatisme. Je distingue dans le christianisme deux grands éléments : l’élément universel, humain on humanitaire, c’est l’amour, la fraternité, et l’élément individuel ou individualiste, égoïste, antihumain ou théologique, c’est la foi opposée à l’amour, c’est l’abstrait si faux et délétère du moi humain, c’est une ombre vide et vaine que la théologie nous veut faire passer pour le vrai Être, le vrai moi humain. Ainsi, je ne fais point valoir la Sainte-Vierge comme figure théologique, mais comme l’image de la femme humaine je ne réhabilite point le Logos des théologiens, mais comme l’image de la parole humaine. Quant aux illusions théologiques, je ne fais que les combattre sans exception ; quant à leur sens anthropologique, je le rétablis partout et toujours. Je ne suis ni antichrétien ni athée dans l’acception vulgaire de ces mots. M. Muller me reproche (page 204) d’avoir défini l’égoïsme comme la seule base du christianisme ; c’est encore une erreur de sa part, la théologie comprend toujours mal.

M. Muller me reproche de l’injustice à l’égard de la tendance de l’homme d’être heureux ; il dit (page 206) : « L’auteur nous apprend que l’homme dans la religion s’objective son propre moi, son être subjectif, en l’élevant à l’absolu, elle est donc de l’égoïsme ». M. Muller devait savoir que la religion et un égoïsme ne peuvent pas signifier, dans ma bouche, autre chose que l’égoïsme irrationnel pris comme opposé à l’égoïsme rationnel, qui est la fraternité. Plus vous vous distinguez de votre Dieu, plus il va se présenter à vos yeux comme un être égoïste, jaloux, exclusif, inaccessible.

M. Muller me reproche d’ignorer les distinctions catholiques, luthériennes et calvinistes dans le dogme de la sainte Cène ; comme si je n’avais pas cité saint Bernard, Ambroise, Pierre le Lombard, Metzger (Théolog. schol.), le livre de la concorde, J. Fr. Buddéus, Melanchthon, Frischlin. Je me suis suffisamment occupé de cette matière, qui doit sans doute être rangée parmi les plus ennuyeuses que l’esprit humain ait jamais élaborées.

M. Muller me cherche querelle à propos de ce que j’ai dit sur les miracles mais je ne sais réellement pas pourquoi il n’en donne pas une meilleure interprétation que la mienne ? J’ai dit Le miracle est la négation de la loi naturelle et nécessaire il s’ensuit que saint Augustin, qui comme presque toute l’antiquité se trouve dans h plus grande ignorance à l’égard de la nature, a dû confondre la