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LA RUINE

ignorants, constituaient tous ensemble, parmi les populations de l’Empire, une seconde aristocratie, dotée de privilèges importants et soumise à un droit pénal spécial. La civilisation gréco-latine était donc fondée sur la puissance des élites, et cette puissance l’était elle-même sur l’idée que les hommes et les peuples sont moralement non égaux, mais inégaux. Une des conséquences de ce caractère aristocratique de l’État et de la société gréco-latine était la limitation des cadres où on pouvait puiser le personnel dirigeant, et, par suite, la limitation du développement de tous les organes politiques et administratifs. On a aujourd’hui de la peine à comprendre pourquoi Rome, même à l’apogée de sa puissance, hésita si souvent à étendre ses conquêtes et à agrandir son Empire. Mais une aristocratie est un corps fermé, qui ne s’improvise ni ne se développe à volonté comme peut s’improviser et se développer une bureaucratie recrutée dans