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M2 SÉBASTIEN CASTELLION· dans toutes ses applications, poussée jusqu’a ses plus mo- dernes conséquences, défendue enlîn contre tous les sophismes théologiques, politiques, historiques. Et par qui? Et au nom de qui? — Par la Béforme et au nom de l`Évangile. Le premier en date de tous les manifestes en faveur de la liberté de conscience, qui se trouve en être du même coup l’exposé complet et le code délinitif, ce n’est pas seulement une œuvre protestante, c’estl’ceuvre même du protestantisme. Un siecle et demi plus tard, l’auteur de l’I1istoii·e des variations, résumant avec force la suite d’arguments que nous venons de reproduire, s’écrie : « Il faut en coiwenir, ces misomiements sont tirés du fond et pour ainsi dire des entrailles du Aprotesmntisme ‘ >>. Bossuet en pre11d avantage contre les Églises de la Réforme, qui 11`aurontjamais l’unité toute-puissante du catholicisme. C’est son droit. Mais sur la question de fait et sur la liaison logique des doctrines, il jugeait bien en associant indissolublement l`idée de la tolé- rance a l’idée même de la Réforme. C’est un acte d’accusation contre lequel nous n’avons garde de nous inscrire en faux. Luther lui-même l’eût—il reniée aussi hautement que l’a fait plus tard Calvin, Luther n’en resterait pas moins le grand introducteur de la liberté religieuse ·dans le monde moderne. ll avait coupé par la racine le principe même de toutes les intolérances : il avait fait de la religion, chose sociale jusqu’alors, une chose personnelle ou plutot la seule · chose essentiellement personnelle. Toutes les libertés sont nées de là. · Le jour où l’l1omme a compris qu`être chrétien, ce n’est pas prendre pa1·t a un acte collectif et extérieur, quel qu’il soit, mais c’est croire soi—mème, aimer soi-même, prier et agir soi—mème, s’amender enlin soi—même et se sanctilier sous la seule autorité de Dieu, sous la seule inspiration de son Esprit, ce jour-la l’hommc est protestant, et sur l’l1eure il est libre, qu’il le sache ou non, qu’il le veuille ou non. Il est libre, car si la foi est l’acte le plus intime de la 1. Bcssuet, 6* avertissement sur les lettres de M. de Jurleu, article CVII.