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LE << TllAlGTÉ DES IIÉRÉTIQUBS >> DE MARTIN BELLIE. 369 _ Prens le cas que Christ, qui est lejuge de tous, soit present etprononce luy mesme la sentence, et·1nette le feu : qui est-ce qui n’aura Christ pour un Satan! Car que sauroit faire autre chose Satan, que de brusler ceux qui invoquent le nom de Christ? O Ch1·ist, créateur et Roy du monde, vois tu ces choses? es tu totale- ment devenu autre que tu n`estois, si cruel et contraire ài toy mesme Quand tu estois sur la terre, il n`cstoit rien plus doux, plus clément, plus soulfrant les injures 2 estant comme une hrebis devant celuy qui la tond, tu n’as point sonné un mot : toy estant tout découpé de hatures *, décraché, moqué, couronné d’espines , crucilie entre les brigaus, en grande ignominie, tu as prie pour ceux qui te faisoient toutes ces ia- jures et contumelies. Es-tu maintenant ainsi changé? Je te prie par le tres sainct nom de ton Père, si tu commandes que ceux qui n’entendent point tes ordonnances et commandemens ainsi que nos maistres requie- rent, soyeut susffoquez en l’eaue, et detranchez par batures, jusques aux · entrailles, et apres poudroyez de sel, dolez par glaives, rostiz a petit feu, et tourmentez de toute sorte de suppliccs, si longuement que possible sera! O Christ, commandes-tu, et approuves-tu ces choses? Ceux qui font ces sacrifices, sont-ils tes vicaires à cest escorchement et d·mem- brement? Te trouves-tu, quand on t’y appelle, ài ceste cruelle bou- cherie, et manges-tu chair humaine? Si toy, Christ, fais ces choses, ou commandes estre faictes, qu’as-tu reservé au diable qu’il puisse faire? Fais-tu les mesmes choses, que fait Satan? — Oh blasphemes horribles! 0 meschante audace des hommes, qui osent attribuer a Christ les choses qui sont faictes par le commandement et iustigation de Satan! Ainsi se termine cette émouvante préface, premier plai- doyer que l’Europe ait entendu en faveur de la tolérance. Cette préface, dans l’édition latine, s’adreSsait au duc Christophe de \\TUl’tCI]1i)0l`g. Les motifs de cette dédicace seraient faciles ai découvrir quand bien même Yéditeur n’aurait pas pris le soin de les expliquer. — Le duc Christophe qui venait de succéder (nov. 1550) a son 1, bleus retrouvons ici de nouvelles traces de la langue familière et populaire dont Cas- tellion se servait. Imlzn·cs par exemple, se trouve sans doute dans Muret et dans Montaigne (voir Vert. llrtleurc dans le dictionnaire de Godefroy), mais c'ctait dejà un met vieilli; et Nic. Celladon traduisant tout ce passage, que cite Bèzc pour le réfuter, lui donne une allure beaucoup plus vive en le mettant en meilleur francais : ·< 0 Christ, créateur ct roy du monde, vois-tu ces choses? Es-tu si change ct devenu si sauvage et contraire ii toy-mesme'? Quand tu cstois en terre, il n'y avoit rien plus benin ne plus dou; que toy, ne plus patient à souffrir injures. Non plus que la brebis devant eeluy qui la tend, tu n’ns pas ouvert la bouche, estunt de tous costez batu de verges, mocque, coronne d'espine : tu as prié pour CEUX qui l·'OUi. fllii. tous (DCS 0U!.I‘t1g65 ..·. COI¥\m£1!ldl.:S—l.Ll que ceux qui UICUÈBIIIICUÈ PIIS tes 0|‘d0l\- llZ\l'lCCS Ci. 0IlS€igIl€U\C!\i.S ültlâi QUC I`C([lllCl`0D.l. UOS l]JlliSi.I`6S soycnt DOYUZ, ])l1tU5 de VCI`gCS, trunspercez jusque aux entrailles et puis salez, que on leur coupe lu teste, qu'ils soyent bruslez a petit feu et tourmcntez si longtemps qu’il sem possible de toutes sortes de tor- mens? ¤¤ (P. 152 du Traitté de l’aut/Lori/ai du nzamshal.) 24