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_ LA BIBLE LATINE. 319 ce droit en plusieurs passages fait sentir cette arriere-pensée. Il touche presque al’ironie : « le lecteur équitable souffrira que, comme Moïse, écrivant en hébreu, s’est plié aux facons de parler hébraïques, le traducteur latin ménage les oreilles latines >> ‘. Et à propos des noms propres : Pourquoi ne pas imiter les Romains qui de Ilerrtclâs ont fait Hercule et d’Asclepi0s Esculapc? Saint Jérome s’est bien permis de modifier certains noms hébreux pour en adoucir la prononciation. Les llébreux eux-memes voulant dire liomanos disent Ilomiim. Pourquoi ne traduirions-nous pas a notre tour Philistim par Palcstin0s?... Brel`, pourquoi ne pas respecter les règles de la langue que nous employons? Nous ne blamons pas ceux qui font autrement : nous leur permettons de ne pas parler latin, mais qulils nous permettent de le parler. Nous donnons aux mots des désinences déclinablesg quelqu`un s’eu est olfensé 1 « Je ne soulfrirai jamais qu’on dise Rabaa au lieu de Baab, j'aime mieux paI·ler barbare que changer le texte sacré. » - Eh! tous les chrétiens déclinent bien Marie et Jesus. Le nom de Raab n’est pas plus sacré que ceux-là sans doute Q! Notons seulement, pour caractériser cette intention de dis- siper le mystere de certains héhraïsmes, l’interprétation qu’il donne a plusieurs reprises aux mots : « [ils de Dieu ». Ainsi, ' (Genèse, IV), il traduit Hominumpotentissimi, et il explique en note que « [ils » signifie « homme » en hébreu peu -pres, ajoute-t-il, comme on dit en francais : un « enfant de Lyon », un « enfant perdu >>) et « de Dieu » signifie divin, dans le sens ou les Latins disaient le divin Platon “. Pour le style, le progres est plus marqué encore, et il vient du dédain même du style. Le même homme qui avait énuméré en trente pages les qualités littéraires de Moïse est déja beau- coup plus réservé quand il arrive a David, et, malgré son admiration ])0LlI‘ ce « prince des poètes, supérieur aux Pindare et aux Orphée », il y insiste ai peine; au lieu des éloges de convention que tout bon humaniste eut entassés, il se borne a lors dans presque toutes les editions de la·Bible· de Cnstellion : la Vulgute, Eusèbe, Sanctes Pagnini essaient tour 21 tour de faire parler la Bible en lutin, mais Custulion _ Frustru 'opern est : fantur Biblia barhnrice. ’ arrive enfin, et .

 Ponunt Biblia bnrhariem.

1. Muses latinus, Azmotationes, p. M2. 2. Mos. lat., p. -643 et 444. 3. Mos. lat., p. 457. ` -