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1>1iErAcE A Eoousnn vi. 307 moins) laisser vivre ceux qui confessent avec nous ce mesme nom de Christ, et ne nuisent a personne ; et qui sont de tel courage, qu’ilz aime- roient mieux mourir, que de dire ou faire autre chose que ce qu’ilz pensent qui doit estre dict, ou faict. ll n’y a aucune sorte de gens au monde moins à craindre que ceux- là. Car celuy qui ayme mieux perdre la vie que de dire quelque chose autrement qu’il ne sent (car il pécherait en le disant, et qui l`y contrain- drait le contraindrait à pécher), je croy qu’il ne faut pas craindre que cestuy la puisse estre corrompu par argent, ou par autre chose. Et certes, j’ay prins garde qu'i| n’en y a point, qui soyent plus obéis- sans aux princes et aux magistratz, que ceux-là, qui craignent l)ieu sim- plement, et se monstrent fidèles en ce qu’ilz savent. Au contraire l'0béissance des autres est feincte, et ne dure point plus longuement, que ce pendant qu’ils sont contraints par crainte, ou attirez par quelque profit. Mais celuy qui est pousse par sa propre conscience à obéir, et qui est enseigné par le Seigneur, qu’il faut obéir aux magistratz et puissances, mesmes encore aux iniques (combien plus.aux justes), son obéissance est nécessairement vraye et éternelle, d'autant que le Sei- gneur Dieu, qui est la cause de son obéissance, demeure vray et eternel. A cette considération qui doit faire rellécliir les princes et les magistrats, Castellion en ajoute une toute pratique : qui se hate de juger se prepare des 1·emordsl Plusieurs se sont repentis d’avoir juge, mais nul d’avoir différé le jugement. Etre plus enclin ai douceur et clémence qu’à ire et vengeance, c’est ensuyvre la nature de Dieu, qui attend si longtemps que corrigions nos vies .... Celuy qui tue incontiuent, ne laisse aucun lieu a pénitence, aucun temps pour s’amender .... Que si ceste voye de douceur, de pa- tience et de benignité est la plus seure, comme elle est, et I’autre voye est pleine de périlz et dangers, cestuy la est hors du sens, lequel a son escient, et de son plein vouloir, se jette au danger. Et comme si tout à. coup il entendait la voix des docteurs qui ne manquent jamais d’intervenir pour armer le bras du prince et force d’arg·uments spécieux, il leur lance ce dell : Que s’il y a quelcun, qui ose contredire à ces choses, il faut qu’il confesse nécessairement qu’il bataille contre le sang * pour l’espandre, et nous, le défendons pour le retenir et estancher. On verra duquel des deux la cause sera plustot facile a maintenir devant Dieu, qui est le juste juge. La préface se termine par un retour sur la personne du jeune roi. Les réflexions qui précedent ne sont pas un reproche a son adresse : il vient de monter su1· le trône; ni une marque ·l. ll cite Proverbes XIV : « inipiorum verba insidiantur sanguini, nt proborum os cum defcndit ·».