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118 SÉBASTIEN `G.~\STELLl0N· . république chrétienne. Et je ne m’en étonne pas : en Fentendant lire, je croyais entendre les foudres de Pericles *. p Au moment où Farel reçut ces lignes pleines d’ardeur et de joie, celui qui les avait écrites n’existait plus. La peste était entrée dans la maison de Calvin, et Claude Feray, atteint le premier, y avait succombé (vers le 15 mars). _ — Aussitôt les médecins ordonnent d’évacuer la maison. An- toine Calvin court chez Castellion; Nicolas Parent venait de partir pour Montbéliard, il y avait de la place chez le logeur. Antoine demande l’hospitalité pour lui et pour lesjeunes élèves de Claude. Ce logeur était un All.ema11d aguer1·i au spectacle des épidémies si fréquentes alors et qui ne craignait, disait-il, 'peste ni lièvre. Il consentit a recevoir les fugitifs, c’est-a-dire Antoine et les trois jeunes gens. La femme de Calvin s’était réfugiée avec ses enfants chez un frere qui demeu1·ait a la campagne. , Trois jours ne s’étaient pas écoulés que deux de ces jeunes gens étaient atteints du même mal : Louis de Hichehourg y ' succomha en quelques heures; Malherbe, le plus jeune des trois, fut en péril de mort. Castellion lui céda son lit “ et le soigna assidûment, se relayant avec plusieurs autres jeunes gens de la petite colonie française. On fit partir Antoine Calvin et Charles de Richebourg, qui allèrent chercher refuge dans un village voisin. ' C’est en recevant ces nouvelles a Piatisbonne que Calvin écrivit à Farel et a Viret ces lettres pleines de sanglots ou se traduisent tour a tour, en accents si vrais, la profondeur de l’émotion et l’énergie de la volonté qui en triomphe. Il résume à Farel ce qu’il vient d’apprendre et il y joint d’amères réflexions : Ainsi à la douleur des pertes consommées s’ajoute l'anxiété la plus vvive pour ceux qui survivent. Jour et nuit j’ai devant les yeux ma femme privée d'appui. Je soutfre cruellement pour Charles, qui, en quatre jours, perd son frère et un maître qui était pour lui comme un second père; et l. Traduit de la lettre latine de Feray En Farel, 8 mars 1540. (Caluini Opp., XI, 171.) 2. v lpsemet ex lecto mee cessi, ut locus esset commodior œgrotis. Nam îbi œgrotavit peste Mnlherbius, Ludovicus vero mortuus est, convictores tui, quibus ego œgrotantibus perpetuo inservivi ut potui. n (Seb. Cast. de/É, p. 361.)