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En Bengale

mais aussitôt, avec l’extrême courtoisie que l’on rencontre aux Indes dans toutes castes, il nous invite d’un geste timide à user de tous ses biens : de la paille fraîche, craquante, et deux petites charrettes faites de cinq à six cannes de bambous non décortiquées, posées en longueur sur deux roues de bois plein.

En furetant entre les paliers, nous découvrons aussi un « mâchan », quatre pieds de bois entre lesquels s’entrecroisent des cordes en fibres de cocotiers qui font tout à la fois lit, sommier et matelas.

Siadous, aidé de notre hôte, va chercher nos literies dans la machine et grâce à la bonne volonté de l’indigène, nous avons bientôt chacun une couchette aussi confortable que le permettent les ressources et les circonstances. Mon frère et le chauffeur se perchent sur les charrettes à l’abri des serpents, des insectes innombrables, des rats. Le choix que j’ai fait du mâchan ne paraît pas aussi heureux. Un grand chien fauve inquiet, rôde autour de mon lit de corde, me reniflant les cheveux, tandis que les voisins, attirés par le bruit inusité, s’accroupissent autour du « hooka » de notre secourable ami, accompagnant le glouglou de la pipe dont ils tirent d’acres bouffées de chillum d’un murmure de voix chantantes et monotones.

Ils demeurent longtemps assis au milieu de la cour, fluets et noirs dans la clarté pâle du ciel sur lequel se découpent les palmes vernies d’un cocotier qui s’entrechoquent avec un balancement rythmé au-dessus de ma tête, tandis que je suis des yeux, sur le tronc fuselé, un lézard énorme qui happe des moucherons imprudents.