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des grèves de leur personnel, et à des luttes entre le coopératisme et le syndicalisme.

Les théoriciens de la coopérative de consommation ont voulu voir dans ce genre de coopération, la solution à tous les problèmes économiques. Mais l’expérience leur montre que le rôle actuel des coopératives de consommation ne va guère plus loin que celui de commerçant et de commanditaire et client régulier de la production. La coopération de consommation, impuissante à résoudre le problème du salariat, autrement que par des phrases creuses, se rendra compte que ses succès actuels sont dû à sa situation spéciale d’intermédiaire, mais qu’elle devra faire une place à côté d’elle et favoriser les autres modes de la coopération.

Sa valeur sociale au point de vue de l’avenir est plus contestable que celle des autres formes de la coopération, car les capacités commerciales qu’elle forgé sont appelées à disparaître dans une société bien organisée, surtout après une révolution sociale.

Néanmoins, telle qu’elle est, la coopérative de consommation est appelée à jouer un grand rôle, comme agent de répartition, de statistique, de coordination de la circulation et des échanges. Par ses fédérations nationales voire internationales, ses magasins de gros, elle peut devenir l’agent régulateur de toute la circulation économique.

Elle a appris aussi au consommateur ce que le syndicat enseigne au producteur : à tenter de ne plus être exploité, en dénonçant le vol manifeste appelé commerce.

Son influence sociale a déjà été énorme ; elle grandira encore à l’avenir. En s’attaquant aux néfastes intermédiaires, en proclamant la volonté des consommateurs de se défendre envers et contre tous, elle aura contribué considérablement à l’évolution sociale. Dans une société libertaire, son rôle légèrement transformé n’en sera pas moins bienfaisant et incontestable.

Georges Bastien.


COQUIN. Le mot Coquin est interprété de différente façon selon la personne à laquelle il s’applique ; parfois il sert à désigner un être sans scrupules, propre à toutes les besognes et d’une indélicatesse notoire. « Ce fonctionnaire est un coquin, il profite de sa situation pour se livrer à des actes malhonnêtes. » D’autrefois il est une expression de mauvaise humeur ou de colère. « Mon coquin de fils n’est pas rentré à la maison cette nuit. » Enfin il est également employé dans un sens malicieux. « L’heureux coquin, toutes les femmes sont amoureuses de lui. » (Beaumarchais.)

Au féminin : Coquine. Ce mot désigne couramment une femme débauchée et intéressée.


CORAN. n. m. Plus exactement : Korañ-lecture. La lecture par excellence. Comme la Bible est le livre sacré des juifs et des chrétiens, le korañ est la lecture sacrée des musulmans.

Le korañ a été écrit, affirme Mahomet (mieux : Mohammed) par Dieu, qui chargea l’ange Gabriel de le révéler par fragments au prophète.

L’histoire de ce livre ne permet pas le silence sur l’histoire de son auteur, dont on a dit trop de mal et trop de bien.

Il est vrai que le korañ est loin d’avoir la valeur littéraire et surtout poétique des livres canoniques des religions de l’Extrême-Orient, ni même de la Bible ; tous livres d’ailleurs ayant eu des auteurs multiples. Mais, précisément pour cela, parce que son auteur est unique bien que souvent compilateur, on y relève moins de contradiction, plus d’unité, plus d’ordonnance, osons dire une meilleure administration parce que Mohammed fut un admirable administrateur.

Il fut, de tous les imposteurs religieux, le plus conscient et le plus intelligent. Tous les autres ont été leurs propres dupes, ils ont cru eux-mêmes à leur mission divine. Mohammed, au contraire, a froidement prémédité son œuvre. Il en est resté le maître et ne s’est jamais laissé saisir par elle. En cela il est unique.

De toute son entreprise, rien ne fut confié au hasard. Intelligent, instruit, doué d’un sens pratique rare chez un grand ambitieux, il se traça de bonne heure un programme qu’il suivit de point en point jusqu’à s’imposer une retraite de quinze années au bout desquelles il ne fit sa « rentrée » que se prétendant illettré.

Le korañ est un des articles de ce programme.

Mohammed est né à la Mecque en l’an 578 de notre ère, son nom, très répandu chez les Arabes, signifie Mo Hamad, c’est-à-dire : l’homme du pays de Hamad, car on se nomme Mohammed chez les Arabes comme on se nomme Lenormand, Poitevin, Dumaine ou Dumesnil chez les Français. Mais certains commentateurs préfèrent un autre sens très soutenable également : loué, comblé de gloire. Ils prêtent à son père des propos qui indiqueraient qu’il croyait au futur rôle de son enfant.

Mohammed était de famille princière, de la tribu des Coréïshites. Il est incontestablement descendant d’Ismaël, donc d’Abraham, le père des croyants.

Selon la légende arabe, quand Agar et Ismaël furent chassés de la tente paternelle, ils se réfugièrent à La Mecque où, quand il fut homme, Ismaël bâtit le premier temple à la gloire de l’Éternel, 993 ans avant la construction du temple de Jérusalem. Son nom : Caraba, signifie simplement carré et vient de sa forme cubique.

Voici pour l’ascendance, de Mohammed. Évidemment des légendes font concorder sa naissance avec de prodigieux phénomènes.

L’enfance du futur prophète fut dramatique : il perdit, à l’âge de deux mois, son père qui lui laissait en héritage cinq chameaux et une esclave éthiopienne. Sa mère l’éleva laborieusement et, quand il eût atteint sa sixième année, elle mourut au cours d’un voyage entre Médine et La Mecque. Il fut recueilli par son grand-père Abd-el-Motaleb, mais ce bon vieillard de cent douze ans mourut tôt après. C’est un oncle, frère utérin de son père, qui recueillit l’orphelin. Cet oncle, nommé Abou-Taleb, lui fit donner une solide instruction. Quand l’enfant eut treize ans il l’emmena avec lui dans ses voyages d’affaires en Syrie. La légende prétend qu’un moine de la région de Damas prophétisa que l’enfant était voué aux plus hautes destinées. Il est en tous cas vrai qu’au cours de ce voyage l’enfant avait eu l’occasion de prouver son sens précoce des affaires, sens qui allait se développer et s’affermir. Outre cela il devait hériter de droit de la charge de son père : préfet du temple de La Mecque.

À quatorze ans il combattit dans les rangs de sa tribu que favorisa la chance des armes.

Il devint bientôt l’homme de confiance chargé des affaires lointaines de Kadige, riche commerçante de sa tribu. Pendant le voyage qu’il fit en compagnie d’un serviteur enthousiaste et témoin prédisposé à l’admiration, les merveilles et les miracles adoucirent le parcours. Au retour, Mohammed avait à peine vingt-cinq ans, Kadige, sa riche maîtresse, en avait quarante et l’absence du jeune affairiste lui ayant paru longue, elle comprit qu’elle l’aimait, le lui dit, lui offrit sa main que Mohammed accepta.

Nous aurions tort de tirer des conclusions sévères de cette différence d’âge, il est même très probable que Mohammed aima son épouse jusqu’à l’heure où elle mourut, vingt-cinq ans plus tard, car de son vivant il n’usa pas du droit d’épouser plusieurs autres fem-