Page:Faure - Encyclopédie anarchiste, tome 1.djvu/273

Cette page a été validée par deux contributeurs.
BOU
271

pression établi, les admette au partage des bénéfices du despotisme. C’est alors que les affranchis privilégiés prennent le nom de bourgeois et deviennent caste politique. La propriété bourgeoise se transmet, non par droit de primogéniture, mais par simple hérédité, avec faculté d’aliéner. Or, par suite de ces deux conditions, il arrive nécessairement qu’une partie des affranchis se trouve privée de propriété. Et ainsi il s’établit, parmi eux, deux divisions plus ou moins tranchées : l’une de propriétaires, l’autre de prolétaires. Mais les bourgeois ne se contentent bientôt plus de partager les bénéfices de l’exploitation avec la classe supérieure ; ils veulent tout avoir. Pour atteindre ce but, ils soulèvent, au moyen de sophismes, la masse des exploités contre les nobles et le clergé, et parviennent ainsi à les renverser. Il suffit, pour ôter toute influence sociale à la noblesse, de lui enlever le privilège de la propriété foncière, et d’abolir l’hérédité par primogéniture quand elle existe. Les bourgeois, autrefois classe moyenne, tout à la fois exploitante et exploitée, sont devenus classe supérieure ou exploitante. Autrefois il y avait trois classes, il n’y en a dès lors plus que deux. Le gouvernement nobiliaire a fait place au gouvernement bourgeois. » (Colins, Science sociale, Tome II, pages 249 et suiv.).

Parvenue à ses fins en 1789, la bourgeoisie ne fut réellement maîtresse de ses destinées qu’en 1830, après les « trois glorieuses ».

Pendant quelques années, premiers dans les écoles, novateurs dans les sciences, les bourgeois, intelligents, firent faire un grand pas au progrès ; mais le pouvoir les grisa, les affola ; le second empire ouvrit l’ère de la décadence. Les théories bourgeoises portent en elles mêmes leur destruction et l’heure de la classe prolétarienne va sonner. Le bourgeois est aujourd’hui : un être borné, sans idéal, infect à force de bassesse. C’est de lui que, pour le bien définir, Th. Gautier a dit : « J’appelle bourgeois celui qui pense bassement ». ― A. Lapeyre.


BOURREAU. n. m. Le bourreau est l’homme chargé de mettre à exécution les peines corporelles prononcées par une cour criminelle, notamment la peine de mort. Par extension, on désigne également sous ce nom tout homme qui se plaît à exercer sur ses semblables une cruauté matérielle ou morale. Par exemple, sont de véritables bourreaux les misérables gardes-chiourmes qui, soit à Biribi, soit au bagne, profitent de leur poste pour martyriser des détenus impuissants. Sont aussi des bourreaux — et non les moins criminels — les généraux et gouvernants qui envoient à la mort, pour satisfaire leurs ambitions personnelles, d’infortunés soldats que l’on a abrutis par de pompeuses proclamations. — Notons quelques détails sur le bourreau en tant qu’exécuteur officiel : ni chez les Hébreux, ni chez les Grecs, la fonction d’exécuteur des condamnés n’apparaît comme une institution légale. À Rome même, les licteurs étaient chargés d’exécuter les sentences capitales. En France, il faut arriver au xiiie siècle pour trouver dans chaque bailliage un individu chargé de fouetter, marquer, pendre, décapiter, rouer et brûler au nom de la loi. C’était l’exécuteur de haute justice, qui percevait, comme émoluments, une foule de droits sur les denrées. En 1720, ces droits furent remplacés par un traitement de 16.000 livres. En 1793, la Convention établit dans chaque département un exécuteur payé par l’État. Louis-Philippe en réduisit le nombre. Sous le Second Empire, il n’y en eut plus qu’un par cour d’appel. En 1870, il n’y en eut plus que trois pour la France, la Corse et l’Algérie. Celui de Corse a, depuis, été supprimé. Ainsi la « civilisation » en est arrivée à posséder un ou plusieurs assassins officiels, alors que l’antiquité n’en avait pas…


BOURSE (La). n. f. Il y a deux sortes de Bourses : les Bourses des valeurs et les Bourses de Commerce.

1o Bourse des valeurs. — La Bourse des valeurs est le lieu où s’opèrent les négociations, les transactions, les spéculations qui déterminent les cours des changes des marchandises, des assurances, du fret, des transports, des effets publics ou privés.

La Bourse des valeurs est placée sous le contrôle des Agents de Change, réunis en Compagnie. La Compagnie des Agents de Change désigne un Syndic qui la représente et est responsable de la bonne tenue de la Bourse.

Seuls, les Agents de change ont le droit de négocier les achats et ventes sur le marché officiel ou parquet. — Pendant la durée de la Bourse, chaque jour, sauf les jours fériés, les Agents de change se tiennent au Parquet, d’où ils dominent la Bourse. Le cercle absolument fermé qu’ils forment ainsi entre eux s’appelle la corbeille. C’est le marché officiel.

Dans d’autres locaux de la Bourse, se tient le marché libre, où opèrent les coulissiers, banquiers, remisiers, intermédiaires et changeurs.

Les valeurs qui se négocient à la Bourse sont ou non inscrites à la Cote Officielle ou Bulletin des Cours, dans des conditions variables, selon qu’il s’agit de valeurs nationales ou étrangères. L’inscription à la Cote est très importante. Seules, ou à peu près, les valeurs classées, solides y figurent. Une valeur non inscrite est généralement considérée comme un titre peu sérieux, peu solide, sur lequel il est bon de réfléchir avant de l’acheter (ce qui, bien entendu, ne signifie pas que les valeurs cotées soient sérieuses, solides ou de tout repos).

Les opérations qui s’effectuent en Bourse sont de deux sortes : le terme et le comptant.

Les opérations à terme constituent le marché fermé. Celles qui se font à primes sont traitées au marché à primes.

Opérations à terme ou au comptant. — C’est-à-dire que ces opérations ont lieu avec ou sans stipulation de délai, suivant qu’il s’agit de terme ou de comptant, tant pour le payement que pour la remise des titres.

Opérations à terme. — Dans les opérations à terme, l’une des parties conserve le droit de se dégager du marché conclu, en payant un prix convenu, appelé prime. Dans les marchés fermés, la perte peut être sans limite. L’acheteur évite cette perte possible en renonçant à l’opération engagée. Sous réserve de versement d’un dédit appelé « prime ». — Ce droit n’appartient qu’à l’acheteur seul. — Le vendeur ne peut limiter sa perte, à moins de se faire lui-même acheteur de « primes » d’une valeur égale. Une prime est d’autant plus élevée que la date de réalisation du contrat est moins rapprochée.

Les opérations à terme ne sont réalisées qu’à une date ultérieure fixée par les parties et à l’avance. — La réalisation prend le nom de liquidation.

Aux dates fixées pour les échéances, vendeurs et acheteurs doivent remplir leurs obligations réciproques ou convenir d’accord d’un nouveau délai de réalisation. — Ce nouveau délai, qui fait l’objet d’une convention qui proroge l’ancienne prend le nom de report. Il prend le nom de déport si l’opération est payée par le vendeur. Si, au contraire, c’est l’acheteur qui sollicite le délai, il conserve le nom de report.

Report et déport donnent lieu à des opérations assez compliquées. Le report se produit lorsque les acheteurs ne pouvant payer les titres achetés sont plus nombreux que les vendeurs ne pouvant livrer les titres vendus. — Le second cas, le déport, est l’inverse du précédent. De cette façon, acheteurs et vendeurs se font ce qu’on appelle « la contre-partie » pour le plus grand