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La Grande Révolution, elle, s’accomplit sans barricades, et ce n’est que le 13 Vendémiaire, sous le Directoire, qu’on les vit se dresser dans le quartier Saint-Honoré et de l’Église Saint-Roch. C’étaient les royalistes insurgés sous le commandement du général Darrican et qui furent foudroyés par l’artillerie républicaine que dirigeait le jeune Bonaparte.

Les 27, 28 et 29 juillet 1830, des barricades se dressent dans tout Paris ; les insurgés, après avoir battu les Suisses, pénètrent au Louvre et aux Tuileries. Le peuple y était déjà entré le 10 août 1792, il devait y entrer en février 1848 et en septembre 1870 ; chacune de ces visites fut la chute d’une monarchie. Les journées des 27, 28, 29 juillet 1830 portent dans l’histoire le nom des « Trois glorieuses ».

Sous Louis-Philippe, les barricades s’élèvent à maintes reprises pour protester contre la royauté, et le 24 février 1848, le roi abdiquait. La République fut proclamée. Les idées socialistes avaient éclos, le peuple réclamait d’autres droits que ceux fictifs de la Déclaration de 1789. La République eut aussi ses barricades et le Gouvernement Républicain fit mitrailler les ouvriers. « La République est morte », disait Lamennais au lendemain des journées de juin. ― « Je suis navrée, écrivait Georges Sand. Je ne crois plus à l’existence d’une République qui commence par tuer ses prolétaires. »

Des femmes s’étaient battues sur les barricades de juin 1848. Des femmes se battent encore en mai 1871 : 10.000, nous dit Louise Michel, qui en était. Elles avaient leur barricade, et elles moururent fièrement, sous les coups de Galliffet, de Thiers premier président de la 3e République Française.

Dernières en date, les barricades de la Commune furent les plus sanglantes : 35.000 Parisiens massacrés, et les plus belles par l’héroïsme des Communards et la valeur de leurs revendications. ― A. Lapeyre.


BASE. n. f. (du grec basis). Au sens propre du mot une base est la surface sur laquelle un corps est posé. Exemple : la base d’un édifice. Par extension, le mot base désigne également la partie inférieure d’un corps. Exemple : la base d’une montagne. Enfin, le mot base est fort employé au figuré dans le sens de principe. (Exemple : poser les bases d’une association) ou de soutien. (Exemple : le capitalisme est la base de la société actuelle.) De même que dans un édifice, dans le raisonnement la base est l’élément principal : si la base est faible, la maison croule ; si la base est faible, l’argument sera ruiné par le premier souffle contradictoire. Qu’il s’agisse donc de propagande par la parole ou par l’écrit, les militants doivent se soucier tout d’abord d’établir une base solide sur laquelle ils pourront ensuite faire reposer un raisonnement inattaquable. De même, pour attaquer l’argumentation de leurs adversaires, ils devront minutieusement dénoncer les cyniques mais fragiles mensonges sur lesquels ces adversaires appuient leurs thèses. Une fois la base ébranlée par une critique méthodique, tout le reste s’effondrera automatiquement, mais aussi que les compagnons prennent garde : leurs adversaires, pour les combattre, auront recours aux mêmes méthodes. Qu’ils méditent donc autant qu’il leur sera nécessaire et que la base de leurs raisonnements soit laborieusement étudiée et éprouvée, pour que nul n’y puisse découvrir une fissure.


BASILIQUE. n. f. du latin basilica qui, pris dans le sens de tribunal, a donné aussi naissance au mot basoche.

On a prétendu que le latin basilica avait eu lui-même son origine dans deux mots grecs désignant la maison du roi, spécialement la partie de cette maison où se

tenaient les assemblées publiques et où se rendait la justice. De là, on a conclu qu’il n’y avait eu aucune différence dans ce genre de monuments chez les Grecs et chez les Romains. Mais on n’a jamais connu de basilique grecque. On a seulement cru pouvoir établir un rapport entre la basilique romaine et le portique grec, comme celui de Pœstum qui subsiste encore et qu’on a appelé improprement basilique de Pœstum, ne sachant quel nom donner à une colonnade qui n’était pas celle d’un temple.

Le portique grec a été à l’origine l’édifice attenant à l’agora d’Athènes sous lequel l’archonte-roi rendait la justice. On l’appelait portique du roi. À l’époque romaine, des écrivains traduisirent le latin basitica par les mots grecs signifiant maison du roi. Il est probable qu’il a existé en Grèce des constructions servant, comme les basiliques romaines, les loggie des républiques italiennes et les bourses d’aujourd’hui, d’abris aux gens d’affaires qui se réunissaient sur les places principales des villes. Il n’est pas resté de traces de ces constructions.

La basilique est donc essentiellement romaine. L’édifice est plus ancien que le mot. Sa forme primitive fut, dans les premiers temps de Rome, celle du lieu couvert où le Sénat se réunissait. Il y avait, au fond, une estrade sur laquelle, assis dans leurs chaises curules, les consuls rendaient la justice. Cette construction, qui était dans le voisinage du forum, en devint peu à peu le complément ; les gens d’affaires ou les promeneurs y trouvaient, contre le mauvais temps, un abri couvert, mais ouvert et sans murs, comme le portique grec. Elle s’agrandit suivant les besoins, s’élargissant par l’addition de portiques latéraux. C’est sans doute à la suite de ces agrandissements que le nom de basilique lui fut donné. Elle comporta alors, en général, une nef principale entourée de rangs de colonnes formant des allées. Les portiques de côté abritaient des boutiquiers et les gens de banque ou de commerce discutant de leurs affaires. Des places spéciales étaient réservées aux extrémités au tribunal. Au-dessus des bas-côtés, des galeries supérieures servaient de lieu de promenade pour les oisifs. Les basiliques devinrent des édifices de plus en plus somptueux par la beauté de leur architecture, leurs dimensions et leur richesse. Elles furent décorées de statues, de trophées, d’œuvres d’art diverses en bronze et en matières précieuses.

À propos de la basilique Ulpienne, Pausanias écrivait au iie siècle : « À Rome, le lieu où l’on rend la justice surprend par sa grandeur et sa magnificence ; ce qu’on y admire le plus, c’est un plafond de bronze qui règne d’un bout à l’autre. » Le plus ancien de ces monuments était la basilique Porcia construite au Nord du forum en l’an de Rome 570 (184 ans avant J.-C.). Il reste un grand nombre de basiliques romaines en Italie et en Afrique. Celle de Pompeï est la seule qui subsiste encore sans altérations.

Quand le Christianisme fut sorti des catacombes et que Constantin en eut fait la religion officielle de l’empire romain, il concéda aux évêques plusieurs basiliques, entre autres celle que le sénateur Lateranus avait fait construire au temps de Néron. Transformée en église, elle devint la première basilique de Saint-Jean-de-Latran. C’est à partir de cette époque que le nom de basilique fut donné à certaines églises, anciennes basiliques romaines transformées ou constructions nouvelles établies sur le modèle romain. Dans la basilique chrétienne, la forme antique demeura, mais l’église proprement dite fut fermée par des murs. Les galeries latérales furent arrêtées avant la nef et séparées d’elle par une ouverture transversale formant avec cette nef une croix ; une arcade en voûte placée sur des colonnes fut substituée à l’architrave. Cette substitution n’avait pas eu d’exemple dans l’antiquité et servit