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Si les Égyptiens avaient des carrières de marbre et des montagnes de granit pour leurs constructions les assyriens n’avaient que la terre dont ils faisaient des briques. Aussi la plupart de leurs monuments découverts sous les sables sont réduits en poussière, la pierre n’étant employée que pour les fondations, les dallages, les statues et les bas-reliefs. Leurs monuments construits en hâte par des milliers de captifs et d’esclaves étaient somptueusement revêtus d’incrustations d’or d’argent et de bronze.

Chaque roi, à son avènement, faisait bâtir son palais et les palais se ressemblaient d’ailleurs. Toujours une forteresse située à l’intérieur d’une ville, enveloppée elle-même par une enceinte formidable.

Écoutons Degouy-Wurmser, agrégé d’histoire, qui trace ainsi le détail de l’architecture assyrienne :

« Le palais s’élevait sur une haute esplanade, reliée à la ville par des terrasses. Il avait la forme d’un immense rectangle, protégé contre toute attaque extérieure par un mur très haut, très épais, flanqué de tours et percé de portes monumentales. Ces portes étaient gardées par des taureaux et des génies ailés.

« Le palais était tout en étendue, parfois 10 hectares, sans étages, mais divisé en plusieurs corps de bâtiments, qui avaient accès sur des cours intérieures. Pas de fenêtres : les appartements s’éclairaient par des portes.

« Les groupes de bâtiments étaient généralement au nombre de trois ; l’un, le sérail ou sélamlik était l’habitation du roi et contenait ses appartements de réception ; un autre, le harem, était la demeure des femmes, des enfants, des eunuques, des servantes ; un troisième, le khan, était destiné aux officiers, aux gardes, aux gens de service.

« Il faut remarquer avec quelle ingéniosité les Assyriens ont su varier l’emploi de la brique. Avec elle, ils construisaient le corps du monument ; avec elle, ils le décoraient. Ce sont eux qui inventèrent la brique émaillée, si gaie, si charmante à laquelle on revient aujourd’hui. Tantôt ils le revêtaient d’une couleur vive et lumineuse, tantôt ils l’ornaient de dessins. Souvent c’était une grande scène destinée à recouvrir tout un panneau ; chaque brique recevait un fragment du dessin ; puis on les reliait ensemble, une fois cuites.

« On n’a pu retrouver, sur la plate-forme où était construit le palais, de vestiges de cours plantées d’arbres, ou de fleurs. On croit pourtant pouvoir affirmer, d’après les pavillons légers entourés de verdure, où les rois se retiraient parfois pendant des semaines, dans une vallée fraîche ou une forêt, qu’ils aimaient à s’entourer d’ombrages. Les restes des fameux jardins suspendus de Babylone semblent aussi l’indiquer. Ces ruines, qui ont aujourd’hui près de 30 mètres de haut laissent voir des terrasses superposées les unes aux autres, où poussaient les plantes et les fleurs les plus rares. On les arrosait au moyen de machines élévatoires qui amenaient l’eau dans le mur auxquelles elles étaient adossées.

« Une tour à étages le « zigurat » indiquant un temple réservé au culte, se trouvait dans chaque palais. Elle était construite sur un soubassement dallé qui s’élevait presque au niveau du toit des maisons environnantes ; on y abordait par des marches ; une balustrade l’entourait. C’est là qu’évoluaient les processions les jours de fêtes.

« Les temples chaldéens sont des tours carrées, en briques, de sept étages, en retrait les uns sur les autres, formant autant de terrasses, réunies par des rampes. Chacun de ces étages était consacré à un des grands astres, et peint d’une couleur différente : blanc, noir, rouge, pourpre, bleu, rouge vermillon, argent et or. Sous le soleil éblouissant de l’Assyrie, cette gamme

de couleurs devait produire un effet éclatant. Des petites chapelles, des statues étaient creusées dans les flancs des terrasses inférieures. La dernière portait un sanctuaire, richement décoré, qui servait d’observatoire aux astrologues. Tout lambrissé de bois rares, avec des panneaux incrustés de pierres précieuses, des boiseries lamées d’or, il renfermait la statue du dieu qui, de là, veillait sur son peuple. L’édifice atteignait jusqu’à 100 mètres de haut ; celui de Babylone, qui est encore debout en partie, mesure 71 mètres.

« Si l’architecture chaldéenne n’a laissé que des ruines, la statuaire a laissé de nombreux monuments. »

On a dit de l’architecture persique contemporaine de la grecque, qu’elle est le « dernier des arts orientaux qu’elle résume dans une synthèse éclectique et grandiose ». En effet, la méthode qu’elle employa arrive à un style, sinon original, du moins d’une grande élégance, parfois, et, souvent, d’une grande pureté de formes.

Les Perses employèrent pour abréger leurs travaux, les briques cuites ou crues qu’ils émaillèrent, comme à Suse, pour en décorer les rampes d’escalier, les portiques, les salles hypostyles.

Ce peuple qui adora la divinité dans la nature, ne lui éleva pas de temples : quelques autels du feu, ronds ou carrés, sans aucun style, étaient seuls destinés au culte.

Pas d’architecture funéraire ; les morts exposés sur des tours de silence, sont jetés dans des puits maçonnés au milieu de ces tours. Les rois seuls se faisaient construire des tombeaux. On enterrait leurs corps après les avoir enduits de cire, pour les isoler de la terre.

Les palais, constructions colossales s’étendaient sur des lieues, comme les palais assyriens. Pasargade, Persépolis, Suse offrent des ruines imposantes. À Persépolis, sur une immense plate-forme, s’élevaient, en terrasses superposées, des palais de diverses époques. Ces terrasses, adossées à la montagne, étaient entourées de murs énormes, formés de blocs immenses de marbre, réunis sans chaux ni mortier. Leur ensemble était compris dans un parallélogramme sur une largeur de près de 500 mètres et 286 mètres de profondeurs, à 13 mètres au-dessus de la vallée. Les dépressions de la colline, remblayées, étaient recouvertes de dallages. Une corniche crénelée formait une sorte de parapet, et on accédait à la façade du côté occidental par un double escalier, à rampes divergentes et parallèles. La pente de cet escalier était si douce qu’on la descendait à cheval ; les marches si larges, que dix chevaux pouvaient y passer de front. Il était précédé d’un perron. L’escalier gravi, on se trouvait en présence des palais de Darius et de Xerxès.

À Suse, à Ecbatane, des fouilles récentes de M. et Mme Dieulafoy ont mis à jour plusieurs palais construits par Darius, Xerxès et Artaxerxès. À Suse, une sorte de salle hypostyle, nommée « apadana » ou salle du trône, qui servait aux audiences solennelles couvrait 7.300 mètres carrés. Cet apadana était entouré de trois côtés, d’une double rangée de colonnes légères de près de 20 mètres de haut. À l’entrée étaient de gigantesques taureaux à tête d’homme. Les murs extérieurs étaient richement décorés de briques émaillées ; c’est du palais de Suse que viennent la fameuse frise des Lions et celle des Archers que chacun peut actuellement admirer au Louvre.

La sculpture perse fait corps avec le monument et le complète. Elle est plutôt un élément de l’architecture qu’un art distinct, car elle n’a ni statue ni ronde-bosse. Elle s’est confinée dans le haut-relief et le bas-relief, s’en tenant toujours aux mêmes images, aux semblables dispositions, aux mêmes attitudes. Aucun effort pour