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M. de Dame, avant de montrer ses charmes, et quels charmes ! à Édouard VII, qui l’attendait dans un salon privé du Café Anglais. Elles s’appelèrent encore Lucie Mangin, Constance Rézucher, Reine Romani, Miss Claryn, Émilienne d’Alençon, qui fut élève du Conservatoire, Otéro, ou Mme Liane de Pougy. Ces dames et ces demoiselles, ces actrices et ces princesses, ces étrangères et ces danseuses furent parisiennes, et non pas seulement parce qu’elles faisaient parler Paris, ce qui est la condition primordiale, mais Londres, Biarritz, Rome, Aix-les-Bains, Carlsbad et Saint-Pétersbourg. Elles étaient parisiennes parce qu’elles considéraient que la vie devait être exclusivement consacrée au plaisir, à la frivolité, au snobisme, à l’ivresse et au tapage. Dans l’exercice de ces jeux, elles montraient une facilité, une aisance, un charme et un entrain qui constituent les bases mêmes de l’attitude.

Il ne s’agissait pas de rester dans un coin et de sourire à quelque comte bien vain de se ruiner pour vous et de vous acheter chevaux, perles, châteaux et tableaux au détriment de sa famille, mais bien de prononcer des mots que reprenaient les gazettes, et de mettre en valeur une fourrure et des bijoux qui avaient plus d’importance dans le chuchotement des milieux diplomatiques que les traités secrets ou les combinaisons européennes. Il fallait faire courber la tête aux princes, ruiner des financiers, acculer au suicide des calicots ou des bouillonneux célèbres, et participer un peu aux mouvements administratifs en fai-