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est simplement accommodé, mais qu’il demeure sous les plâtras et les décombres…

Nous entrons à la Boule Rouge, toute sonore de copeaux d’accordéon. Douze garçons s’élancent à notre poursuite et nous indiquent le chemin vers les banquettes dites du fond, où il reste quelques places encore entre des soldats et des bourgeoises du peuple. On ne vous laisse même pas le temps de choisir du regard un endroit plus propre à vous recevoir, ni même le loisir de vous orienter dans ce parc colorié comme une coupe anatomique et constellé de girandoles et de pièces électriques payables par traites. La loi est de suivre quelque maître de cérémonies qui fait sa salle comme on fait un wagon-lit. Des consommations passent au-dessus de votre tête, ce pendant que la machine à faire des javas et même des rumbas trompette et piétine, pareille à une batteuse. Vrai, on aimerait mieux le tramway…

À peine assis, je suis abordé par le gars du restaurant, le fils de l’homme au parapluie, sorte de Pépète en fil à fil, qui le prend vexé, me confondant sans doute avec quelque « miché » louche, insulteur du peuple. Le pauvre !

— Dis, murmure-t-il d’une voix aiguë et méprisante, c’est-y que t’as l’habitude de chercher des crosses ?

— Qu’est-ce que vous voulez ? Qu’on vous remplace votre parapluie ?

— T’en fais pas pour le cure-dents. Je te demande où c’est que tu voulais en venir ?