Page:Faguet - Pour qu’on lise Platon, Boivin.djvu/86

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

les honneurs au mérite, elle donne les plus grands à ceux qui ont plus de vertu et les moindres à ceux qui ont moins de vertu et d’éducation. Voilà en quoi consiste la juste politique, à laquelle nous devons tous tendre, mon cher Clinias, ayant toujours les yeux fixés sur cette égalité dans l’établissement de notre nouvelle colonie. Quiconque pensera à fonder un État doit se proposer le même but dans son plan de législation et non pas l’intérêt d’un ou de plusieurs tyrans ou l’autorité de la multitude ; mais toujours la justice, qui, comme nous venons de le dire, n’est autre chose que légalité établie entre les choses inégales, conformément à leur nature. »

Il m’est certes impossible d’expliquer ce que Platon veut dire ici. Cette égalité introduite entre des choses inégales, cette égalité proportionnelle qui ne peut être que l’inégalité, ce partage des honneurs selon les mérites et en considération de la vertu et de l’éducation qui est à peu près la formule de la Déclaration des Droits de l’homme : « la République ne connaît d’autres motifs de préférence que les vertus et les talents », mais qui reste bien vague et qui en tout cas est si peu l’égalité que précisément elle l’exclut ; cet essai, en vérité sophistique, de donner le mot en retenant la chose et d’arriver péniblement, en quelque sorte, à pou-