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geant que les Constituants et les Conventionnels sur ce point. Pour eux, en matière de liberté individuelle, le droit de l’Etat n’existe pas.

Il existe cependant, et les Déclarations auraient dû l’indiquer au moins d’une allusion, pour tracer ici comme ailleurs ces limites entre les droits de l’Etat et les droits de l’individu qu’ils s’étaient précisément proposé de déterminer. Est-ce que, quand le gouvernement m’impose le service militaire, il n’empiète pas sur ma liberté individuelle ? Que dis-je ? Est-ce qu’il ne la supprime pas ? Et est-ce qu’il n’en aurait pas le droit ? Il la supprime et il a le droit de la supprimer. Il la supprime absolument. Car, remarquez, non seulement il me prend trois ans de mon temps, ce qui est un empiétement énorme sur ma liberté personnelle ; mais encore il me destitue purement et simplement comme citoyen. Il me soumet à l’obéissance passive (en quoi j’estime qu’il a parfaitement raison) et ne me permet plus de vivre, comme les autres, dans la simple obéissance légale. Il me met très positivement hors la loi.

Il y a plus, ce qui peut paraître étonnant : il se peut qu’il viole en moi non seulement la liberté individuelle, et non seulement la liberté politique, mais encore la liberté de penser, la liberté de croire, la liberté religieuse, tous les droits de l’homme, tous ! C’est fantastique. Mais c’est vrai. Voyez. Que diriez-vous d’un gouvernement qui