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étroit ; mais l’égalité vraie, c’est que la terre, ni quoi que ce soit du reste, ne soit pas à quelques-uns. L’égalité est absolument contraire à cette extension de la liberté individuelle qu’on appelle la propriété individuelle.

Elle n’est pas moins opposée au fond à ce qu’on nomme les libertés intellectuelles, c’est-à-dire les libertés de la pensée, de la parole et de la plume. C’est moins évident au premier abord, parce qu’ici il y a un passage d’un point à un autre, il y a une ligne de démarcation à franchir, en deçà de laquelle l’égalité ne semble pas opposée à la liberté, ne croit pas l’être et en somme ne l’est pas précisément ; au delà de laquelle l’égalité est absolument antipathique aux libertés intellectuelles et ne saurait les souffrir.

Vous avez une façon particulière de penser et de croire et de raisonner. L’égalité n’est point choquée, l’égalitaire ne vous en veut pas. Chacun est libre. « Que chacun dans sa foi cherche en paix la lumière. » C’est du Voltaire, qui était égalitaire, en tant que césarien, mais qui n’était point du tout libéral. Vous publiez un livre où vous vous montrez intelligent. L’égalitaire n’est pas très content, toute supériorité l’irritant parce qu’elle l’offusque ; mais il vous reconnaît le droit de publier un livre et de vous y montrer intelligent. Il préférerait seulement que vous vous y montrassiez médiocre.

Mais vous réunissez un certain nombre d’audi-