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indifférent à l’égalitaire que l’État soit ruiné ou qu’il soit prospère. La preuve, c’est qu’il adopte une foule de mesures conformes à ses passions qui obèrent terriblement un État déjà à demi ruiné. Les vues économiques du socialisme sont donc pour le socialiste paroles d’apparat et « style de notaire ». Le socialiste est un économiste à qui l’économie politique est indifférente. Le fond vrai du socialisme c’est : « Il est insupportable que quelqu’un possède plus qu’un autre, parce que c’est une supériorité. » C’est pourquoi le gros des socialistes a oscillé si longtemps et oscille encore entre le partagisme et le collectivisme. Il ne lui serait pas désagréable que les choses fussent possédées individuellement, pourvu que chacun en possédât autant qu’un autre, pouvu que personne n’en possédât plus que quiconque. L’absurdité du partagisme, son impossibilité pratique a seule amené le gros des socialistes au collectivisme qui est : « Eh bien ! soit ! alors, que personne ne possède rien ! » La propriété individuelle choque tellement l’égalité que proclamer l’une c’est abolir l’autre. Jamais le peuple n’a pu comprendre autrement, et en comprenant ainsi il est logique. La première année de la Révolution a vu proclamer l’égalité, une toute petite égalité, l’égalité des droits devant la loi, et a vu brûler les châteaux. C’était la logique du peuple qui traduisait. Egalité, soit. Les légistes peuvent interpréter cela au sens